Pages

13/03/2012

56.j'aime sentir l'écume au petit matin dans le rond noir de mon café au-dessus de la point de mon pinceau trempé de l'huile criarde des bons jours!




Qu'il l'eût déjà prouvé mille fois, cela ne signifiait rien.



Il fallait le prouver encore.



Chaque aventure était nouvelle.



Le vieil homme et la mer d'Hemingway.

57. les grands hôtels du front de mer sembleront silencieux comme de majestueux pachydermes endormis





Je vais le voir, sentir sa voix comme un souffle sur ma peau.




Sans doute, si je peux arriver à ce but, je serai uni parmi la foule mais toujours seul en-dedans. Ca n'aura pas beaucoup d'importance puisque sa voix sera là, tout au fond, pour quelques temps. A me remplir des merveilles tristes, du monde des petites rues, des rêves impossibles qui fuient de partout. Et ceci dans l'sens où on s'le mangera journée nocturne et chemise brune. J'ai peur!

58. insérez ici le titre qui vous plaira




J'aimerai bien te montrer ce paysage, ce défilé de petites situations au sortir du boulot. Ces spirales de froid qui collent à la route, les paillettes de neige qui s'agitent dans l'air et descendent tout doucement sur la terre. Le visage rond d'une fillette aux joues teintes de rose, elle a comme toi la peau pâle et les yeux clairs...



Plus bas c'est la vie, on traverse un village affolé pour dire qu'ici aussi la civilisation est la même partout (mais anglaise, toi-même en saisira la nuance délicate). Et puis on rentre bien au chaud dans des cubes modernes. Voici la vie qui en découle. Ce long silence qui hurle tout au fond.

59. la petite histoire de la grande boucle




Sur la vitre mentale au-delà de laquelle se meuvent et tournoient, aquatique ment, d’ambigus ustensiles frappés d’un point de côté - celui des anges - l’instinct diamant d’Henri Michaux poursuit ses méandres. Mille et une fois rayé, et comme jamais, le verre prend la couleur, la forme, la dureté ou la plasticité du moment aigu qu’il reflète et assume, moment où, près d’étouffer, d’avoir le mal de l’air, le poète lance sa main préservée, la jette et trace, en désespoir de cause, tel un rameur exténué, les mots libérateurs. Provisoirement.
L’acte littéraire de Michaux, fulgurant ou effiloché, enveloppé d’humour, institue une sorte de coma qui permet à sa victime, enfin dégagée, un somnambulisme actif, grâce auquel le souvenir de tout geste, parole, signe, traverse la vitre initiale, se débarrassant, au passage, des obstacles qui font penser. Or, penser, comme disait Valéry c’est perdre le fil. Michaux est le trapéziste précis de ce fil sur lequel il exerce son impatience et sa pathétique cruauté. A hauteur frontale, il s’y ménage un lieu de balancement, un poste, un réduit, une plage, où il fatigue sa fatigue, se suce les nerfs, mobilise ses fous; c’est là, entre to be or not to be, entre mi-fugue mi-raison, qu’avec force et faiblesse, présence et absence indifféremment, il résiste. En perpétuelle instance d’humanité, c’est-à-dire de poésie caillée, essentiellement transitoire dans son inutilité souveraine, Michaux reste, assez paradoxalement, l’un des plus vivants, des plus réels défenseurs d’un espace menacé, dans les réseaux duquel s’infiltrent les estafettes marquées d’une armée, dont il est, avec quelques autres, si j’ose dire, privilégiés, organiquement, l’ennemi absolu. Michaux n’est lézardé que dans l’extrême mesure où il n’a pas été touché, empoisonné, mais s’est laissé défaire, par tenace, quoique involontaire, fidélité à ce qui, dans l’homme, répond le moins anecdotique ment, accidentellement, aux sollicitations brutes du désir, qui soulage toute chose mouvementée en expulsant son hasard temporel: « Savoir, autre savoir ici, par savoir pour renseignements. Savoir pour devenir musicienne de la vérité .» Il tache son espace mental - comme l’ombre d’un pur-sang, le champ de courses.
Sartre écrit qu’il faut changer pour rester le même. Michaux le prouve. Et témoigne qu’il y a pire que le fait très simple et un rien prématuré d’être revenu de tout: celui d’être revenu de rien. Mais il doit y avoir de l’être. Même moi, il faut assurément que je sois.

60. l'art invisible




L'enfant s'est enfui bien loin de moi. Les couleurs sont pastels.



Je rêve d'un autre monde. I need an another world.



Haïkus sonores. Villes grasses. Je t'ai connue dans tous les coins vieille France...

61. portrait de nos jeunesses débauchées




Elle adore le noir.



Vieille boîte où nos parents draguaient, fût un temps où même nos grands-parents lièrent connaissance à cet endroit précis. Je me souviens de ma jeunesse avec désespoir, des sanglots dans la voix, ce "ce n'est plus ce que c'était avant" qui rejaillit comme un cheveu en plein milieu de la soupe et qui monte jusqu'à ma voix, il redescend en passant dans mon système sanguin tout proche de mon coeur sans l'atteindre réellement. Juste de quoi freiner ma respiration et encore, j'ai l'habitude avec les Benson de ne plus respirer. Alors ce truc passe jusqu'à mes doigts, il jaillit sous mes ongles et me tâche d'encre noir-de-jais.



Osmose avec une inconnue.



"Salut, tu viens pour quoi?



- Je mate la télé!



- Pas pour draguer?



- Non, je mate la télé.



- Tu skies?



- Non, je mate seulement la télé.



- Mais t'as une passion particulière pour le ski?



- Aucune, ça me répugne. J'y ai laissé mes jambes quelque part. Là-haut".



Et j'aperçois soudainement des skieurs planqués dans la montagne sur cet écran sybillin, je n'avais pas vu que dans le paysage se cache le pervers de la descente. Il me semble que mon écriture jaillit d'elle-même dans ma tête, longuement mâchée, je ne veux pas écrire ainsi ce pseudo documentaire. Alors pour un instant, entre des culs de toute part qui se trémoussent au son d'un tube remixé, il y a un type qui regarde un écran une bière à la main et c'est tout. J'ai seulement oublié qu'autour se déroulait les envies qui démangent dans le pantalon. Ce soir j'ai des envies de lâcheté justement.



Elle adore le noir, pour sortir le soir.



Alors je serre une main, la main qui m'accompagne, je lui souris. A la prochaine l'ami, drague bien. Je le pousse sur la piste, dernier petit tour et je m'envole. A peine sorti, une clope au bec, je réalise que ces conneries ne sont plus de mon âge. Je vieillis prématurément. Tout m'exècre. Ca coule sous ma peau, ça me démange, les histoires de untel, les coucheries de l'autre, et plus rien ne compte que de partir, quitter tout ce qui importe ici.



"Aujourd'hui, enfin dans la journée, j'ai entendu mon horoscope à la radio. Ca disait que je trouverai celle qui me satisfera. Laissez-les choses couler et venir d'elles-mêmes, disaient-elles, alors je n'ai pas cherché à comprendre. Je n'ai pas dragué.



- Et? tu as trouvé ce que tu cherchais?



- Non, mais j'ai fait le constat pénible que, alors, la personne la plus à même de me satisfaire était moi-même. Il est minuit cinq et je ne crois plus les horoscopes, j'ai fini ma journée, je retourne me coucher satisfait de mon alcool. J'ai une humeur de chien. Voilà ce que je suis ce soir, la voix imbibée de l'hydromel parfait."



Alors je rentre, insatisfait de mon écriture Beigbedienne, je pleure cinq minutes dans le hall d'entrée avec cette putain de chanson dans la tête, j'ai une envie de me frapper la gueule contre le mur, de finir la gueule en sang. Dans ma déprime involontaire je réalise que j'en viens à aimer une seule chose: mon écriture dramatique de grand bourré.

62. Saint-Malo




Du Georges Perros que je ne connaissais qu'à peine, dont l'âme se découvrait tout juste du bout des doigts. La caresse intime du papier, l'amour d'un Michaux-inconnu, l'odeur du neuf mélangée au vieux de la couverture mais surtout ses mots sans cesser les étreintes:

Puisque tout est fatal et que l'ombre s'immerge
Dans les cristaux de deuil que sécrètent les jours
Puisque tout arbre sage a pour toute herbe vierge
Le prestige des dieux absents de leurs séjours

Puisque la mer abîme un rocher qui émerge
Acide une jetée embarque les balourds
Puisque le feu s'infecte en réduisant le cierge
Et qu'il croit s'endormir en violant le velours...

Et mourir de plaisir...
Puis mourir...

63. au fait




Car si je fonde l'homme, je délivre de lui des démarches d'homme, si je fonde le poète je délivre des poèmes, et si je fais de toi un archange je délivre des paroles ailées et des pas sûrs comme d'un danseur.

Lire Citadelle dans une autre vi(ll)e ou le relire, rêver du haut, voir le soleil et mourir à plusieurs dans d'autres draps...

64. nous sommes un mardi

la lassitude d'une nouvelle année, les clients qui en redemandent et vous circulez votre fouet ou votre godemiché à la main en hurlant: "qui veut se faire approfondir? qui veut profiter de la croissance économique? demandez l'programme! demandez l'programme!".

65. 2010



Il faut se laisser couler peu à peu, se faire entourer d'eau tout autour et dans nous. Se laisser happer par l'eau des égoûts, ouvrir la bouche pour forcer les dernières bulles à sortir. Ne plus tomber amoureux, garder un peu de confiance, et ne plus se livrer sur nos états. Il faut devenir un ordinateur implacable si l'on veut affronter 2010. C'est la seule solution paraît-il, moi j'en vois des millions.

66. to change





et changer d'air, c'est tout ce qui importe. Changer aussi, du tout au tout. Henri Michaux à relier.

67. they read books (09/10/10)





Ce qui ne m'intéresse plus: les détectives sauvages, livre bien trop long que j'ai parfois envie d'abandonner, le goût me manque, j'allume une clope, mais même la clope me fait défaut. Je passe à Anton Tàpiès, des mots de hasard sur des toiles bienvenues, les mots me manquent, arrêtons les frais ici. Je pense que depuis hier je suis devenu idiot, tout simplement.




Le portrait de Dorian Gray se déguste, en lire trop d'un coup est mauvais pour la santé. C'est comme boire un bon vin, on ne soûle pas avec, ou si peu. D'autres choses viennent me parasiter, je rallume une clope, mais je n'en ai pas plus envie que ça. Les traductions de Omega The Unknow et Fear Agent peuvent bien attendre. Je n'ai le goût de rien mais l'envie de tout. Je ne peux pas danser, ça non je ne peux pas danser, le son de la Bostella m'énerve, j'ai tué ma mère avait réussi l'exploit de me concentrer, aujourd'hui je n'y suis plus, j'ai à peine ouvert le fichier "bloody sunday", à peine regarder dedans, les films politiques m'emmerdent, les livres politiques me font chier, ou alors mon traître de je-ne-sais-plus-qui. Cette histoire historique. Magistrale. il y a bien d'autres choses encore sous mon crâne, bien d'autres envies, mais je frise la perte de contrôle, alors je me tais. j'observe le monde du dehors, un de ces quatre je vais m'envoler par la fenêtre pour peindre une dernière fois un reste de chimère. Dansons la Bostella!