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30/01/2010

383. Over There


J'ai le mot du maudit sur la langue de bois élévée à la bière québécoise. Et voilà le temps qui redescend, les néons du néant et pas grand chose à raconter, conter encore l'impossible, compter...

Ce n'est que le début dans le froid des fournaises, il pleut encore sur le sommet et tout est blanc-chantilly. On saupoudre un peu de caramel dans cette eau lourde. Si forte qu'on en voit les muscles. Il y a du frais et du frais encore. Un corps. Un corps qu'on croise qui joue du cor dans ce faux décor (des corps?). Au sortir du brouillard: ne pas confondre les ombres des fantômes. Ne pas s'amuser avec ça; au contraire, c'est ceci qui a besoin qu'on le console d'un piano.

Rejouer les dernières valses, écrire sur un coin de table qu'on a bien mangé en quelques lignes mais que le repas fût dégueulasse. Je suppose que le chef pisse encore dans les bouches-à-la-reine, que faut-il dire?

"mais appelez donc la police?"

et comme la police c'est nous on se téléphone l'un et l'autre, l'un demandant à l'autre de la crème l'autre demandant à l'un ce vieux remède de grand mère. C'est bon, je l'ai, avais-je pensé soudainement en me levant alors, la journée s'écoulait dans le sablier, le temps ramassait ses billes, le sel saupoudrait mon café et se terminait tout droit devant. Puis le temps se leva, les jambes poilues ne furent jamais rasées, tout un car de touriste tomba en panne. Il manquait les trois autres cars. Déchiffrant l'infranchissable dans l'incodifiable j'ai voulu imiter le chimpanzé sans succès. Recalé. Le car ne put repartir, les touristes râlèrent et le chauffeur s'amusa en les faisant applaudir.

"J'ai raté ma vocation; m'apprenait-il à moi et mon collègue de collège, je voulais travailler en salle!"

Mais il n'est jamais tard pour une vocation, ni pour partir vendre en Angleterre, toutes les fermes se rencontrent puis de toute façon la journée se termine tranquillement. Alors le visage plein de terre et le coeur miné on se surprend dans une glace à la fraise. Voici que je suis comme...Ou que U.... me ressemble. Oh non c'est trop, trop, tropico!

"Relax Max!" m'avertit Karl qui ne s'appelait pas Karl.

"il se peut que demain on te fasse la même!"

384. petit mensonge entre ami(e)s


à l'instant à l'instant mes dames, ne touchez pas plus au caviar qu'à l'homme. Les deux sont moisis depuis demain, il faudra s'armer de patience jusqu'aux bouchées-à-la-reine. N'attendez plus que le poisson cuise, servez-le ainsi, tout frétillant dans la grande vasque argentée, j'attendrai pas plus longtemps, je veux perdre le passé en route.

à l'instant à l'instant mes dames, laissez-moi une heure ou deux dans votre subconscient, j'ai toujours aimé la cervelle de porc. Je veux couler l'or pur au fond de vos gueules, sentir mon sperme chaud vous retravailler les (basses) côtes.

Terminez donc la crème anglaise et toutes les fondues des alpes, ne sortez pas trop tôt le nez dehors et le gâteau au chocolat, se serait dommage que le croquant se termine en fondant, puisqu'il faut bien mourir de quelque chose mourront de nous manger nous-mêmes.
Je vous énerve? N'était-ce pas le but mes dames?

à l'instant à l'instant je me ris de vous, tous ces mensonges que je ne dit pas, jamais, et que je garde en digestif. Puisqu'il faut bien savoir que je suis le plus doux des agneaux avec l'humour féroce d'un cannibal cynique perdu dans la fôret. Puisqu'à l'instant où je nettoie ma lame, que je deviens loup prêt à vous dévorer, il me faut devenir hargneux pour vous avaler tout rond sans remord. D'où cette petite méchanceté.
Mais s'il vous plaît, courez mes dames, je n'aime pas la viande trop grasse!

29/01/2010

385. Camille


Je m'envoie des lettres anonymes pour qu'on connaisse pas l'adresse de ma solitude.

28/01/2010

386. l'inutilité d'un coquelicot


J'ai des tickets de cinéma dans la poche d'un film que je n'ai pas vu.

J'ai des vêtements de l'Inconnu dans ma penderie.

Je me fais une autre idée de la mélancolie.

Je réécoute la solitude de Ferré.

387. Kris


Eh! quoi te dire et quoi faire dans cette vieille rue aux pavés délavés? J'étais au comble de l'ironie, tout autour venaient les fantômes d'un autre temps. Ils erraient en rond sans cesser de s'ét(r)eindre pour moi?

Je devais en faire quoi de tout ça? me réinventer un monde ou laisser les choses pourrir? Je ne savais plus vraiment dans ma vieille barbe blanche. Mon crâne dégarni me faisait mal, mon corps fissuré et mes chemises en lambeaux.

Alors je cherchais une réponse dans tous mes livres, mais la vie n'est expliquée nulle part. On se ment à soi-même d'abord quand on ouvre un livre, on cherche à apprendre des erreurs des autres, mais très vite on comprend que dans les livres ce ne sont que ça ces petites histoires de vie intéressantes: des erreurs. Alors on raccroche tout, nos chemises et nos envie d'idées, on se mord un peu plus jusqu'au sang. On emprunte la mine renfrognée d'un Bud Spencer en fermant les poings dans ces poches, un cigarre au bec pour se dire qu'on a mûri. On se ment encore à notre corps, on se délasse on se délaisse d'une apparence. Ressemblant à rien on finit vite dans la rue Grenelle ou la rue des amours en rejetté, mais ce n'est pas grave les premières années.
On en vient vite à parler aux fantômes, leur dire, eh, oh! tu voulais que je fasse quoi?

J'ai vécu en attendant la mort des montagnes de bons sens qui n'étaient dans aucun manuel. J'ai chanté des tubes aux étoiles pour leur faire comprendre l'impuissance. J'ai aimé mille femmes de tous pays et bu dans toutes les coupes. Je ne suis pas un clochard, je suis un roi qui sait que la vie avant tout c'est notre propre plaisir, mais vous qui lisez ceci, après tout, ne suis-je pas entrain de commettre une erreur fatale dans l'explication?

27/01/2010

388. oh Marlène!


Je rêve de Marlène, m'intéresser plus à elle et me faire un cycle entier sur sa vie. C'est décidé, Bertrand m'a inspiré cette nuit, je n'en peux plus. Je suivrai Marlène jusqu'en dehors des combats!

389. il y a quelque part dans la nuit une ville et Dieu sait quoi, c'est difficile à imaginer...


J'ai vu ton sourire au lendemain quand enfin tu te rhabillais lassivement, perdue de me quitter, et que mes baisers se déposaient dans ton dos. J'avais oublié ma littérature en route, mes connaissances dans la rue et ma haine dans l'escalier menant à la chambre.
Nous nous étions posés sur le lit délicatement, était-ce la force de nos baisers? je ne savais pas. On s'est déshabillés en se déchirant, étreinte difficile au demeurant, tu m'avais laissé dans le soin de me détacher d'une peau la trace d'une griffe. Je n'avais pas fait mieux, j'ai oublié une dent dans un coin de ta cuisse. On avait appelé ça l'amour, mais n'était-ce plus?
A cet instant d'unisson peu importe le monde et les guerres, on sait bien qu'alors sur le lit "autour" n'existe plus. Et ce lit pourrait voguer n'importe où de la même manière que celui de Little Nemo escalade New-York de ces grandes jambes.

J'ai planté mon corps en toi en même temps que t'implantais ton âme à l'écrase le long de la mienne. J'ai dérivé sur les océans métaphoriques de la pleinitude, le scandale mélancolique de ce moment m'importa peu. Et puis le réveil, tu étais souriante, j'étais dans ton dos, je voyais ton sourire rayonner tout autour de toi (ainsi que dans la vitre de cette chambre non-située). Tu te rhabillais lentement.


"J'ai peur.

- De?

- De notre amour si fort!"


Alors je suis sorti, nu. J'ai acheté des fleurs plus bas dans la rue avec je ne sais quel argent. Comme un automate j'ai tourné à droite. J'ai rattrapé mon chapeau sous l'arc-en-ciel des ébats. J'ai saisi des mots à l'envolée. J'ai contemplé le silence. j'ai attendu que les anges passent au feu rouge. Tout était sens-dessus sens-dessous. Et mes jeux de mots pourris ont ris de moi quand je me suis fait écrasé par les poèmes de Victor Hugo. Alors du fond de mon paradis je rêve à ce ticket invalide, j'ai beau le mâcher jusqu'à l'épuisement il revient sans cesse dans ma main. Alors je lève mon verre à Hugo: cet immense dragueur de mille femmes qui n'en aimât qu'une.

390. au-delà de cette limite votre ticket n'est plus valable


Tu cherches mon regard. Jamais tu ne m'as demandé comme tant d'autres femmes: "à quoi penses-tu?" ce qui m'a toujours fait l'effet d'un passage de bulldozer. Tes lèvres se collent aux miennes, et la brûlure parcourt mon corps et éveille en moi celui que j'ai été. Mais ce qu'il y a encore de spontané dans cet élan se double aussitôt de besoin d'assistance et le visage moqueur de Carlotta passe devant moi; elle m'avait beaucoup fait rire, autrefois, en me disant de sa voix italienne: "lorsqu'un homme commence à guider d'abord ma main et ensuite ma tête, je sais qu'il n'en a plus pour longtemps."

Trop de vie, trop de connaissance, trop d'humour...Mes mains courent sur ton corps, s'attardent, insistent, mais je demande surtout à mes caresses de me stimuler moi-même. Je te touche doucement, à peine, à peine, pour que tes seins, tes cuisses creusent ma main de vide et m'appellent encore plus. Surtout, ne pas penser, ne pas se chercher et se guetter, mais faire appel à cette lucidité au second degré qui sait éviter ce qu'il y a de périlleux dans la lucidité. Ton visage, tes yeux se voilent, ta main me cherche...

- Oh toi, toi, toi...


Romain Gary.

26/01/2010

391. le savoir


l'ignoble constat au sortir du cuvier: "vous souffrez d'hypermnésie".

Tu en ris dans un premier temps: "ah bon...et c'est grave docteur?" en sachant bien que oui, tous les symptômes sont là et pour la première fois on a pointé une flêche sur toi qui vient de t'atteindre. Le secret est tombé, il n'y à plus à se cacher, sortons gaiement du placard avec nos personnalités à la con et explosont l'impensable.
Elle de se confier à son tour, la psy qui ravale sa fierté en se trouvant sur le divan; rôles inversés:

"C'est désarmant de se retrouver acculer par des patients plus intelligents que vous, que suis-je alors quand on me découvre, finalement? Je reste humaine, je ne détiens plus de secrets et tout se brise.

- J'aimerai changer cela, vous êtes là pour m'aider, non?

- Je ne sais pas, je ne pense pas. Je ne pensais pas venir ce matin dans le but que mon patient me perce ma carapace et en découvre plus encore sur moi que sur mon propre mari. Quel âge avez-vous?

- Vingt-quatre ans et des bananes.

- J'ai quarante-deux ans et des myrtilles, mon mari en a quarante-cinq. Me voici donc découverte, je ne peux plus. Je suis au bout du rouleau, comme je vous l'ai dit je ne pensais pas e livrer toute entière ce matin en me levant à mon patient et me retrouver perdu face à son peu de savoir mais la connaissance seule du secret humain et terrible; savez-vous que vous avec ce don de comprendre les personnes dans les moindres détails?

- On peut percevoir cela comme un fardeau?

- Bien sûr, c'est aussi extraordinaire, vous avez raté votre vocation!

- Pas pour moi, je me prends trop la tête, je n'aime pas les autres, alors me retrouver dans leur tête non merci!

- Mais vous êtes déjà dans leurs têtes à tous!

- A ce qu'il paraît oui, c'est en ça que c'est horrible, savoir quand on aime que tout va bien c'est beau, c'est romantique dans l'exemple, mais savoir qu'elle s'apprête de vous quitter avant qu'elle même ne le sache c'est horrible et répercutant.

- Répercutant pourquoi?

- Parce que je me demande sans arrêt cette chose: à force de savoir qu'elle allait me quitter, n'est-ce pas moi qui ai provoqué tout ceci?

- La question de la poule et de l'oeuf revisitée?

- Exactement, vous permettez que je fume??

- Oui oui, faîtes!

- Merci, et vous sinon, vous comptez faire quoi avec votre mari?

- Je ne sais pas vraiment, je vais rentrer, la table sera mise, il aura tout fait pour moi, le ménage et s'occuper des enfants. Il aura glissé dans la chaîne hi-fi mon CD préféré, allumé une bougie sur la table et me servira un exquis repas accompagné d'un excellent vin. Le repas se terminera en massage, une nuit d'amour torride, et épuisé il me dira je t'aime avant de s'endormir tendrement sur l'oreiller. Tout sera trop parfait et je vais en pleurer.

- Alors apprenez-lui l'originalité, dîtes-lui simplement que la perfection tue l'amour.

- Mais il remettra ça en cause, ajoutera que je suis psy, que je le pyschanalyse!

- Dîtes-lui seulement que ce n'est pas la psy qui parle mais la femme, celle qui est tombée amoureuse du beau jeune homme qu'il était à ses débuts, et que vous crevez d'envie de recommencer cette longue route, car après tout, ce n'est qu'un problème sumontable qu'il s'agit là, non?"


Mais j'ai quand même payé ma séance!

392. Un écrivain est un homme qui n'arrête pas d'écrire son testament


comme une envie de démence qui vous prend soudain sur l'oreiller. Vous n'avez alors plus qu'à en faire à votre tête, et votre corps défendant -je parle de celui qui ne tient pas la route- vous supplie par un livre inabordé depuis trop longtemps:


Il criait "Dieu est mort" en se bouchant les oreilles.


Mais tout le monde sait, ou devrait savoir, qu'un athlète au mieux de sa forme, c'est presque un squelette.


Je me suis fait un non.


Ecrire un peu, à la sauvette, comme on se brûle, m'aura peut-être appris à mieux parler.


Ce que nous nous reprochons généralement, c'est de n'avoir pas osé tuer. De ne pas s'être tué, aussi, par impuissance. Mais, enfin, il est bien vrai que le suicide, c'est l'impuissance où l'on se trouve de tuer trop de gens à la fois.


Il faut qu'il soit dominé pour dominer.


L'homme qui peint ne s'ennuie pas. Car tout est à peindre, à dessiner, à croquer. L'attention du peintre est perpétuellement sollicitée.


Un tableau c'est une pensée sous scellés.


Le tableau dit à l'homme: "ce que tu penses ne me regarde pas."


Que va faire le poète chez le peintre? Se rafraîchir les idées.


La poésie n'est pas exacte. Elle est juste. Et elle t'ignore.


Vivre est fatiguant. A tel point qu'on en meurt. On meurt de vivre, on n'en peut plus.


Alors, les yeux remplis du brouillard de Georges Perros, j'envoie la dernière salve de ce semblable de Michaux puis retourne me coucher:


Je crois que la poésie est une espèce de maladie, à rebours si tu veux, qui conteste plus qu'elle n'approuve, qui nous solidarise en nous retirant. C'est très simple ce que je veux dire: on ne peut pas vivre en poète.

393. que ne sais-je?


Douce âme,


de vous à moi je ne sais point, je ne vois que les corps imaginés, ceux qui nous trompaient dans la tourmente. La flamme vacille au vent des mots, tout s'emporte sur ce passage désastreux, corps tronqués, corps soufflés de vie étale.

Il vous faut vivre parfois comme la mer, tomber amoureuse au gré de la houle, sentir se goût de sel sur la peau du corps-flambé de nos passions. Nos corps soulevés alors, déchirés sans cesses, ils hurlent la nuit dans cette tourment contre laquelle pourtant je vous avais mise en garde. Mais je sais que le corps est sourd parfois à la vérité, qu'il brûle d'une aveuglante étreinte de quelques minutes tout juste puis, une fois consumé s'en va de l'autre côté de la mer, emporté par les quatre vents. Laissez-moi chanter désormais ce corps poétique souffrant d'un millier de soleils éteints.

Nos corps ont joués, ils se sont aperçus que nos corps faméliques ne retenaient plus rien, finalement coeur sourd à l'amour, corps ouvert au changement. Corps de mer contre corps militaire tout entier, corps qu'on fusille au petit matin d'avoir trop aimé. Corps qu'on reverra ou corps oubliés, nos corps lassés de nous-mêmes comme autant de corps blasés du silence.

Le cri du silence, voilà le complexe le plus beau de l'amour, le plus vulgaire, le plus obsessionnel mais aussi le plus dévastateur. Alors il ne restera plus rien de nos corps impatients, de nos corps démis, de ces corps démunis, des coeurs qui roulent sans cesser d'apprendre sur la dureté du monde; ce vieux concept qui veut que l'on soit commun. Nous sommes tous égaux il paraît.

Chère âme délicieuse et capricieuse, laissez-moi vous chanter quelques petites notes de musique, un vieux refrain sur les lèvres d'un corps qui en a trop vu et pas assez:


"la la la je vous aime chantais la rengaine

la la la mon amour"


Et finalement nos corps trompeurs gagneront la course de nos coeur de jeunes, ils éxulterons le soir entre les commodes et se perdront dans l'amitié réparatrice-salvatrice, chancelants ils se serreront les coudes jusqu'à attendre un autre signe de la main d'un autre corps, un corps enjoué en ce début de mois d'avril. Ils se trouveront tous deux, corps heureux, corps des débutants, et ce sera les plus corps du siècle ces corps faciles qui ploient sous la franchise de l'amour.

Alors ils enlèveront les mains de leurs yeux, d'un côté l'un dira: "j'ai bien vécu mais peu aimé, voici que la vie m'offre un coeur en argent" et l'autre se soumettra au jeu des milles questions: "ce peut-il que cette valse ne stoppe donc jamais? Ainsi je vais aimer, mais pour combien de temps encore?"

La main dans celle de l'autre ils sauront, le corps prochain, le corps suivant, le corps en sourire et les paupières qui rigolent. De la fumée d'amour plein les yeux, y'en aura sous leur crâne. Et la musique continuera en boucle, sans cesser, des paroles sans rien de sublime mais pourvu que l'amour amène toujours une romance de vacances...ou éternelle valse du genre humain.

Mais je me rends compte qu'au sortir de ma lettre je ne vous ai pas encore parlé des corps-morts, des corps décomposés, des corps débauchés, des corps futiles, des corps-absolus, des corps de fête, des corps de saison, et bien d'autres corps encore...

Mais n'ai-je pas toute la vie pour apprendre sur les corps et vous l'apprendre à mon tour?


En espérant revoir votre corps très vite je vous souhaite d'en prendre soin autant que le mien puisse vous le souhaiter.


Monsieur A.

24/01/2010

394. j'ai volé mon âme à un clown


Il y a un paquet de clopes sur la table, une odeur de café qui flotte encore dans l'air et un aftershave bon marché. Quentin qui danse dans un coin, pauvre Quentin, que n'as-tu laissé traîné cette nuit-là au fond des bars cette jolie demoiselle? Il fallait lui apprendre tes tours de passe-passe avant qu'elle ne file à l'anglaise!

Donne-lui donc les clés, à cette illusionniste qui s'évanouit d'un brouillard de fumée, laisse-lui le temps de s'acclimater à une nouvelle période. Elle semble perdue, dans la métempsychose, alors tu lui a demandé: "mais où donc vos pensées s'étiolent-elles?"

Elle ne dit rien, elle prend ta main et s'enfuit vers moi.

"Je vois un paquet posé sur une table, 19 cigarettes alignées, celle qu'il vient de fumer manque à l'appel. Un livre de Raymond Devos est en travers, le stylo à côté pour noter les pages intéressantes à la capuchon mal fermé. Dans la nuit ce stylo s'asèchera irrémédiablement, quelle catastrophe!

- Ce n'est qu'un objet!

- Pas vraiment, le stylo parfois c'est la vie. On note tout avec, sans stylo pas de poèmes du nouveau siècle. Oh bien sûr, me direz-vous, il y a toujours l'ordinateur, les données informatiques: tous ces mots qu'on n'écrit plus et qui comptent pourtant!

- Mais dire je t'aime sur un clavier est un acte de sauvage.

- Pas tout à fait, plutôt comme un acte manqué. Une ébauche si vous voulez."

La belle venait de s'enfuir, à la dérobée Quentin, je dois bien te dire que ce matin traînait dans ma rue ce petit bout de femme qui me prit au dépourvu.

"Il y a une table en bois dans une cuisine, un paquet de dix-neufs cigarettes. L'une vient d'être fumée. Le bouquin de Devos sur la table arrêté à la cent-treizième page est légèrement posé en biais. Un stylo décapuchoné à côté du livre s'asèche. Les plantes au-dessus du frigo meurent du froid qui galope sans petit bonhomme de chemin dans l'intérieur qui sent le café. Les odeurs s'en vont, les plantes gèlent, la pièce est vide de toute nature humaine. A travers la fenêtre l'ont voit le brouillard qui descend de la montagne comme une vague qui détruit toute réalité sur son passage. Elle vient tout doucement recouvrir le paysage jusqu'à cette fenêtre et je ne distingue plus que le haut d'un arbre enneigé et le haut d'un reverbère enneigé également qui clignote. Plus loin derrière le toit des maisons s'efface peu à peu, on entend le bruit de la circulation des véhicules dans la rue et pendant que les plantes au-dessus du frigo se meurt ou qu'une toile peinte il y bien trop longtemps (celle qui siège dans la cuisine) s'abîme, se craquèle, on entend le chat qui ronronne en silence, bien au chaud derrière la porte de la cuisine."

Quentin, j'ai vu ta femme, et je lui ai dit que la dernière cigarette, je l'avais encore en bouche.

395. sous acide


Il a fondu fondu dans la nuit sous acide.

Tout doucement tout doucement dans la grande nuit.
Dernière nuit de folie.


Le long du téléphone, à écouter les pillules qui lui parle.
Ego-trip. Transit. Intox.

Le long du téléphone, il chante.


Je souffre de ne pas souffrir.
Je souffre de ne pas souffrir.
La la la.


Il a fondu, fondu dans le bocal.

Il se laisse faire. Fondre jusque dans l'eau.

Il se demande combien y'a-t-il de questions dans le monde.

Tout devient trop clair.

Tout recommence.
Ah oui. Le monde.
Le monde...


Il est toujours le long du téléphone.
Il descend descend.
Combien y'a-t-il de questions dans le monde?

Une de plus. HP.


Folie, douce folie des acides.
Il coule il coule jusqu'au voisin du dessous.
Lui se retrouve à se piquer.
Il coule il coule dans sa cuillère.
Et le démon qui le ramasse lui dit:

"Tu veux un fix??"

396. osmose, climax, c'es pareil


il faut dételer les cheveaux, lâcher la bourrique endiablée par-dessus la bride et laisser cet animal se défouler dans la plaine. Il va s'en aller galoper jusqu'au fond de la prairie, dans la fraîcheur du petit matin les narines détrousser, le chamfrain au vent, la tête haute, fière. La rosée éclaboussera de mille feux sur son passage, les fleurs seront piétinées, la mauvaise herbe avalée pour le besoin de la purge. il reviendra vers son maître, le narguant de sa haute taille, de sa fière allure, cambré comme un fou pour défier celui qui tient les chaînes. Sortant de la brume matinale tel le diable sortant des enfers, son noir pelage reflètera le soleil qui commence à pointer. Il se fera animal courageux, mais aimant, tête baissée. Le maître collera une main contre sa royale tête, sur son corps nerveux et sec, il y aura de la fierté dans son regard que l'animal rendra à sa juste mesure. Alors le dialogue commencera entre eux. L'un disant à l'autre:

"J'étais dans le cantal, il n'y a rien dans le cantal. Des dimanches d'ennui et la semaine de travail, les trente-cinq heures exécutées en bien plus. J'ai vite pris du poids et des cheveux blancs à patienter calmement devant mon petit blanc et le tiercé des passionnés. Les copains se foutaient de moi, j'emmagasinais les dollars dans l'attente de mon canasson, je ne pensais pas qu'il aurait si fier allure..."

Et l'autre, l'animal, de se confier à son tour:

"J'étais fier porteur des rois du Nil, voguant humblement sur les vagues de sable du désert. La tempête n'a jamais réussie à m'atteindre, j'étais un roc sombre, jeune instrument dans les mains d'un dieu. J'ai appris la vie à la dureté du soleil et de ses caresses terrifiantes; aveuglantes. J'étais paré d'or, le porteur élégant. Une guerre m'entraîna à me coucher dans un coin. Je ne suis pas mort, je dormais..."

Il y aura les larmes du souvenir ravivées:

"J'ai l'impression m'être marié avant l'heure, être devenu un vieux con avant l'heure. j'avais toujours un train de retard sur les autres. Mais les trains ça m'intéresse pas, on peut parier sur la machine mais où est la puissance du corps, les liens du muscle et des os? Le sang ne coule pas dans les veines du train. Je connais mon corps, je suis par contre en complète admiration devant celui d'un cheval, puissant et mystérieux. C'est ce qui m'intéressait en toi, tu dégageais une fougue remarquable quand je t'ai vu. J'ai croisé ensuite ton regard et j'ai vu le passé, le présent et l'avenir réunis. Je t'ai vu jeune prince fougueux, je t'ai senti courir dans mon champ, je t'ai vu devenir roi. Ca va changer ma vie! Regarde-moi si mal en point mais guai, je vacille sur une jambe mais de l'autre je danse! J'ai arrêté de boire, de défier les lois des hommes et l'avidité de ma femme. Je ris de toute ma vie, mais la facilité de tracer un trait sur celle-là ne fût pas simple. Je n'ai pas baissé les bras, loin de là, je me suis battu jusqu'à hier, mais maintenant tu es là, animal triomphant."

Mais aussi des explications:

"J'étais debout dans le matin de l'homme, je l'ai vu qui gambadait dans mes sabots. J'étais énervé, impétueux, avec mon sale caractère. L'homme pouvait bien tenter de m'apprivoiser je restais succeptible à la moindre brise. J'ai toujours fait ce que je voulais, que l'homme ne croit pas m'avoir dompté, je n'en ai toujours fait qu'à ma tête. J'ai mes caprices dans la vie, comme ce petit homme que j'avais choisi. Ce général de haute figure qui avait un peu dans le sang des idées politiques de chevaux. Qu'il soit aimé ou non des siens m'importait autant que la mouche sur mon postérieur. Je sentais ce petit homme se grandir à la seule force de son caractère. Alors je l'ai accompagné dans la poudre des canons, à la descente des plus belles villes, faire la cour aux femmes et l'amour au combat quand le cavalier s'unit à son quadrupède le temps d'une valse à dix-huit trous. Quelle drôle d'époque était-ce là, la mode en plumes et les guerres qui continuaient. Il domptait les hommes mais pas les chevaux, c'est pourquoi je garde autant d'estime de cet homme que de toi qui a su voir la vérité dès ce premier jour...tu te souviens maintenant du jour où je t'ai choisi?"

L'homme surpris: "Non, pas vraiment, c'était quand?"

L'oeil royal étincelle de mille feux: "C'était maintenant".

L'homme sort de sa torpeur, il tient toujours la liesse de billets dans le fond de sa poche. le voici ahuri en face de ce même cheval. Le voici entouré de plusieurs acheteurs potentiels, dans un champ clôt avec la mine apostrophée. Son autre main se sépare doucement du poil de l'animal, un autre homme lui parle. le qui, le quand, le quoi et le comment, tout ce mélange au fantastique dans sa tête. Et le vendeur demande:

"Alors, vous le prenez?"

Et bien sûr l'autre acquiesce et se dépêche de donner la liasse de billets, que sont peu de papier contre autant de rêves?

21/01/2010

397. petite entorse au règlement


Ce matin les méchancetés étaient parties, j'écris enfin pour quelque chose payant. Il fait bon vivre, mais sortez-moi ce putain de titre de la tête au pied de biche auparavant. Vous serez bien urbain. Merci d'avance.

398. ce matin...


Dans le bus, tous les matins. Prendre le bus d'assaut, être piétiné. Et puis on voit que des corps entassés qui semblent pourrir, se détacher, tomber en désuétude. Moi je suis tombé en disgrâce ce matin devant elle. Jeune enfant, fille de mon sang. Je te savais loin de moi.

Mon corps tremble de te revoir, il s'afolle. Un peu plus et je me défait. Me voici feuille, gros, moche, personne ne pourra me reconnaître. Alors toi non plus. Pas un regard. Rien. Tu étais avec ta tante. Il ne me semblait pas avoir reconnu ta mère sous un bras, sur un pied, derrière un dos, devant un ventre, la tête contre la vitre les fesses contre la barre d'appui. De toute façon toi et toi seule m'importait. Mais je me suis souvenu que ta mère m'avait dit que je n'allais plus revoir ma fille, elle gueulait, criait fort. Je n'étais qu'un con sans plus de raisons que ça et chaque pas que je faisais me rapprochait de ma pauvre fin de merde. Alors ce matin dans le bus quand j'ai vu ton sublime visage j'ai donné raison à ta mère. Voici le jour où je t'ai abandonnée.

20/01/2010

399. blizzard vous avez blizzard


Tempête, pluie fine, gouttelettes sur le visage, gelures aux pieds.

Tempête qui récluse au fond des vents, au fonds des cîmes, dans les profondeurs.
Parmi les interstices...

Tu étais où?


Par là-bas entre le col de ... et le sapin qui fait l'angle du chemin des ...


"J'ai vu un homme tombé sous le col. Vu d'ici il s'agissait d'un point. L'instant d'après une coulée l'emporta au fond de la vallé. Il est mort sur le coup. C'est fini. L'hélico tournait dans le ciel gris, point jaune et rouge sur un fond défait. Les hélices faisaient vibrer l'air. Tout autour c'était la pagaille, les animaux s'enfuyaient de tous côtés. Les arbres penchaient. La neige tombait encore. Il a fallu le pêcher. Creuser la neige, sonder, piquer, creuser et sortir le corps inerte de là. Et puis remonter avec sa trouvaille...
Bien sûr c'est triste, mais vous savez bien ce que c'est. On choisit de monter, on connaît les risques, ceux qui montent sont sûrs qu'un jour ou l'autre ils y resteront définitivement... Ne reste alors que de ces corps de l'impossible les dernières empreintes dans la neige qu'ils ont tracées, celles qui s'effacent peu à peu et qu'on oublie."


Tu repars alors, habitué de ces vies bien trop brèves.

19/01/2010

400. Quentin (petite folle)


Min copain, la bave aux lèvres et le sourire dans les yeux, tu étais beau dans ce moment intense. La sueur qui ruisselait sur ton corps et tes joues qui s'ouvraient puisqu'une femme était entre tes doigts. Min pote, tu me manques. Tu es venu hier soir à la maison, tu m'as donné tout ce que tu pouvais. Et tu bougeais dans tous les sens, heureux. Ca m'a fait tellement de bien de te voir que j'ai oublié l'espace d'un temps de présence que le monde tournait encore.

Et puis tu es parti. Seuls nous comprenons nos jeux et nos corps.

12/01/2010

401. all along the watchtower!


Marcher dans ces dernières rues vécues, et se dire oui, c'est cet hôtel cet hôtel-là...et apprendre le jour-même la mort de ton ex-femme alors que j'étais proche de cet hôtel qui a volé une partie de ma vie musicale. vraiment pas de chance alors, non?

402. the world


Relier les points.
Taille par taille.
Compter les ponts, ne pas te trouver dessous par le plus grand des hasards.
Je vais au marché, cueillir des légumes.
Je ne trouve pas les trucs verts ou blanc qui font péter.
Quinze grammes de tabac pour décoincer.
Mon coeur s'arrête, les poumons brûlent.
J'ai pris feu de l'intérieur.
J'entends des musique dans ma tête, je connais cet air.
Vieux refrain.
Vieille rengaine.
Personne à danser.
Pierrot Lunaire qui traverse la rue.
Vieil auto-stoppeur qui serpente entre deux voies.
Maladies en tout genre; poison du monde.
Un verre pour passer le goût de...
Tourner tourner tourner.
Sans cesser, sans cesser.
J'ai quelques Romain Gary dans la poche.
Deux trois mots. Pas plus.
Jetés en l'air et un sourire en coin.
C'est fou, oui je sais, c'est fou de tenter le sourire par ce temps.
Un message, une lettre, un espoir, un cahier.
Il suffit d'un rien.
La folie gagne du terrain, on a lâché les lions dans la rue.
Passants affolés, singe qui chipent.
Clowns qui pleurent/clowns affreux.
La rue se transforme lentement.
Le boulanger passe.
L'autre, avec ses planches ou ses vitres, je sais plus.
Et puis le complet bleu avec ses lunettes.
Et enfin Jean Hélion qui rigole.
Il pose la dernière touche sur la toile.
Et me voici devenu oeuvre d'art pour l'éternité.
(Plagiat cela-dit d'un Balthus il me semble).

08/01/2010

403. je ne pense pas




Allongé dans la neige à attendre la terre. Il lui poussera bien deux arbres au milieu du front. La nature fait bien les choses, elle le recouvre tout doucement de son manteau de fourrure, et les lapins peuvent bien courir entre ses cuisses ouvertes il ne bouge pas d'un caillot. Sa barbe et ses cheveux se mélange au rare lichen des arbres. Les écureuils déposent des noix dans ses narines et les oiseaux se nourrissent de ses chaussures. Le voilà regardant le ciel, c'est beau un ciel défait. Les nuages tournent, blanc-crème et gris-noir. Un hélico le cherche, il n'est déjà plus là. Les charognards sont là. Choucas aux cris stridents, oiseaux moqueurs, tournent en rond pour indiquer la proie immobile, le rêveur alité. Le sapin tente de le réveiller d'un gland sur la tête. Sa bouche accueille l'araignée et ses petits pour la nuit. Le skieur enfin le découvre, remue son bras et les rares personnalités qu'il entretient dans sa manche. Le skieur pose une glace sur ses lèvres, l'araignée s'enfuit loin dans la gorge par peur de son reflet déformé. Le skieur ferme les yeux du mort. Il porte la radio à ses lèvres et descend plus bas dans la vallée dans un bruit calme de sport de glisse. Voilà que tout redevient calme, que les écureuils qui se sont enfuis viennent reprendre la nourriture, que l'oiseau continue d'avaler la chaussure et que l'araignée sort la tête de la bouche pour voir ce qui se passe. Alors les choucas haut dans le ciel rigolent des peines des humains, de leurs vies à la con sans ailes et de leurs désirs misérables de faire des choses incompréhensible même pour le monde du dessous.

404. Babylone alone



Vivre et mourir en alternance, porter un masque, tenter sa chance. Dans le palais des grandes habitudes j'étais le roi de vos procédés mono-maniaques et tout allait bien jusqu'au jour où le fou me désigna la mauvaise porte. Quel félon était-ce là? je n'en connais point la véritable nature, au jeu de l'amour j'attendais que vienne mon tour mais le bus ne passa pas de la soirée et je dû me résoudre par la suite à rentrer à pieds. Juste suivre le chemin des papillons par devant les églises, le nouveau roi me gronda farouchement puisque j'avais perdu mon titre dans une tombola ou, une fois n'est pas coutume, je me risqua aux jeux des sentences (oui celui-là même où l'on ne fait que perdre). Juste suivre le chemin pavé de bonnes intentions, les résolutions illuminaient ma route jusqu'au retour. Alors il me fallait encore passer chez Thomas, brave Thomas...
Tu n'écris plus.
Non, tu n'écris plus.
Plus comme avant.
Avant moi.
Et les résolutions s'éteignirent d'un coup, j'étais dans le noir, perdu, désemparé, le coeur quelque part en vrac et toutes mes idées creuses qui mouraient en si bonne compagnie. Ma tête tomba, roula sur le sol. Thomas m'appelait au loin sans que je sache par où était sa maison ni même la mienne. Je suis tombé sans ma tête dans les ronces, elle me piquèrent de parts en parts. Violé par les aiguilles jusque dans mon intimité je décidai de fuir n'importe où. J'ai vu de la lumière au fond de l'enfer et je suis rentré, le Malin m'accueilla, mon heure n'était pas encore venue. Il me rappela les faits, mes erreurs et mes tromperies. Pour tout ce que j'ai fait j'ai compris que oui, l'enfer peut bien être rempli de gens comme moi. Alors j'ai quitté l'enfer, remonté le sentier de la perdition jusqu'au carrefour des âmes damnées. J'ai bifurqué devant le chemin des âmes en peine au rond-point du purgatoire puis tout droit jusque chez les nains. Le dernier des sept vînt à ma rencontre, il me tînt à peu près ce langage: "C'est sûr'ment à vous qu'il manque la tête! Je vais vous emm'ner chez la dame, elle saura remettre votre chef puisque c'est elle qui l'a retrouvée!". Chemin séant, me voici donc dans l'auberge du désir, demeure de Blanche-Neige, et me voici qu'elle m'appelle mon doux prince!
Je ne l'a voyais pas encore, mais je sentais ses caresses sur mes tempes et ses mains sur mon front. Une fois ma caboche bien vissée et mon sang circulant à nouveau, mes yeux s'ouvrirent sur ses lourdes mamelles emprisonnées dans son corsage, j'ai dû donner pour ma part ce qu'il restait de mon corps pour remercier la belle personne, et au moment de partir je me rendis compte qu'il n'y avait plus d'argent dans mes poches. Un papillon vînt à mon aide, il se déposa dans ma main, je sû l'attirer jusqu'aux cheveux de ce doux ange aux cuisses écartées.
"Voilà; dis-je, maintenant que je t'ai rendu plus belle, accepteras-tu que je t'épouses?"
Elle rit bien fort, c'est que la belle ne choisissait que les rois, et comme le roi ce n'était plus moi, je suis reparti chez moi la queue entre les jambes en apprenant sur la route que bientôt le fou se marierai avec Blanche-Neige. Quel folie était-ce là? C'était juste la vie qui continuait son petit bonhomme de chemin incompréhensible.

07/01/2010

405. naufrage


un naufrage écrit il y a quelques temps déjà:

J’ai remonté la longue avenue des cœurs au chômage sans perdre espoir. J’ai tourné à gauche pour bifurquer au dernier moment devant le troquet des abrutis. La lumière du plafond vacillait terriblement. Je me demande bien comment j’ai fait toutes ces années afin de ne pas couler. Mais maintenant que sombre les heures, les heures silencieuses, les heures délicieuses, j’en appelle à la bière.
Nous sommes tous des naufragés dans l’âme ici. On se serre les coudes le long du comptoir et on en appelle au passé. On se raconte la vie d’avant, nos vies actuelles se passent de commentaires alors qu’on relance une tournée générale au son des standards anciens de la radio. Tout est perdu, le temps s’enfuit. Marianick danse au beau milieu du bar, elle bouge son gros corps frétillant rempli d’alcool au souvenir de sa jeunesse. Tu te souviens, dit-elle à son interlocuteur, j’étais jeune, belle et nue. Tu me couchais dans l’herbe. Ton sexe bien lourd en érection, pointé devant moi, pointé en moi…
« Putain putain c’est vachement bien! » s’exclame l’autre que je ne connais pas devant la télé.
Je me suis penché un peu plus vers lui, il continuait de parler tout seul, il s’adressait au président:
« C’est vachement bien, nous sommes quand même tous des européens ».

406. cherchez encore mais ne passez pas par là


Puisqu'il n'en fallait qu'un dans cette voiture immense à la carcasse rouillante sur cette pauvre route de fin de vallée. Lancée à 300 sous la pluie qui se disait détester le goudron mais continuait à avancer. C'est ainsi qu'il écrivait sans perdre l'espoir que la pluie cesse, trimballé dans tous les sens comme au temps des diligences, lui qui rêvait d'écrire sur ces esprits flamboyants de cette époque-là sans trop savoir par où commencer. Alors il disait que la vie...puis laissait sa phrase en suspend dans l'air car il n'avait plus de remarques de bon sens à placer ni même une citation de Nietzsche dans la poche. Le bonhomme qui lui avait monté ses valises lui avait pris la dernière apostrophe. Pourtant il fallait continuer dans ce village où l'on se dépouillait de tout, avancer sans perdre les yeux par derrière. C'était ainsi pour bon nombre de philosophes - et bien qu'il n'en fut un en aucun cas - la route se terminait d'un coup.

"Au dila du chiman il y a pu. Rien missié, rien missié" tentait vainement de lui expliquer l'ancien colonisé. Et bougrement vrai, la révélation de cette fin équivalait bien une citation de Nietzsche. Il pouvait continuer d'écrire, maintenant que la voiture immense n'avançait plus et que les touristes embarqués avec lui dans cette galère avait tout le loisir de se détendre, de sortir râler ou encore de fumer.

"hum hum" toussota-t-il pour faire comprendre que la fumée d'un gêneur lui bloquait les bronches et que les bronches bloquait sa respiration et que sa respiration handicapait son mouvement et que le mouvement non-effectué était du temps de perdu sur son travail puisqu'il ne pouvait pas écrire. Alors il devait mémoriser la phrase le temps de tousser, ou du moins de faire semblant de, ensuite l'appliquer sur le papier de la même manière que les enlumineurs des îcones russes prenaient soin de coller la feuille d'or au millimètre près.

Il se souvint alors d'un enlumineur rencontré à Tchekov, ce petit village en bordure de mer prusse, pour qui il s'était pris de sympathie. Il ne se souvenait tout de même point de son nom, mais le récit de sa nuit était là. Il se souvenait de cette nuit agitée, de l'élan qui lui avait pris pour clâmer les meilleurs mots de ledit philosophe. La poésie, renchérit le russe, passe par la boisson. Le coeur des hommes est fait de la boisson qu'ils avalent. Nous nous avalons en sommes.

Mais René soupira en essayant de disperser ses souvenirs aussi loin que son pays de naissance l'était de cette maudite voiture. Il s'étonna, pourquoi avait-il pensé à cette foutue Russie et son souvenir qui était à des lieues de ses idées actuelles sur le fait de se trouver soi-même quand il n'y a plus rien à découvrir? Voilà encore une question qu'il se devait de poser, car la fourmi du désert avancait bien plus vite, car les images se succédaient au mot et que la maudite voiture n'allait pas pouvoir continuer plus loin qu'il le fallait. Alors il se prit la tête dans les mains, les larmes roulaient sur ses joues, voilà qu'il ne se comprenait plus, qu'il ne savait plus rien, que l'infini qu'il pensait acquérir avec l'immortalité se jouait de lui. Il redevint un vulgaire enfant, ravala toute son intélligence de pacotille pour pleurer de plus belle. Et les larmes le noyait presque sous mille tonnes de flottes. Il ne se sentait plus couler, il ne sentait plus ses joues, et il était bien incapable aussi de dire depuis combien de temps n'avait-il pas pleuré ainsi. Alors tout son bel argent n'était rien d'autre qu'une putain dans le désert qui attend le client. Aussi inutile que puisse l'être la brindille verte dans une meule de foin.

06/01/2010

407. lettre pour leur absence inexpliquée


je sais à quoi m'attendre ma soeur, maintenant que la vérité est dite, que le chemin est tracé il ne me reste plus que l'indolence ou le pardon de vos jeux. Mes pas hésitants frémissent, me voici couvert de sang de la tête aux pieds. J'aimerai te dire qu'il ne s'agit pas de mon sang, que cette mélancolie douce-amère s'envole comme à chaque fois que... mais non, rien n'y fait et je suis ainsi. Je tourne en boucle, du moins je semble tourner en boucle car mes pas ne sont déjà plus les même. Mais ça tu le sais bien, et donc oui, j'aimerai te dire que ce n'est pas mon sang, que ce n'est pas le sang de la femme qui m'a porté, que ce n'est pas le tien. Mais un sang est un sang, la vie ne s'échappe pas pour autant, j'ai ce que tu appelles une bonne étoile au-dessus de ma tête. Je n'ose plus te parler, je n'ose plus te dire l'absence mais la douleur oui, c'est ainsi que le fer est forgé. Le feu réchauffe un peu de tout, on se récrée dans l'infini pourrissant des grands calculateurs sans mot dire. L'éternel gentil ne râle pas, il laisse couler. Il ne dira rien en se rongeant jusqu'aux os, tu le sais bien qu'au point ou ma carcasse usée éclate de l'eau aura coulée sous les ponts. Alors il me faudra encore courir dans l'autre sens que la terre, vivre bien d'autres vies. Sais-tu que j'ai été prince égyptien dans une autre vie? Non, tu ne le sais pas. J'ai perdu à vos jeux, tu le sais. Je ne suis pas joueur, je ne suis pas un gagnant. Je ne termine pas mes romans et sans doute cette missive finira-t-elle dans la mare à canard jusqu'à ce que j'épuise mon million d'idées. Me voici donc à nouveau sur la route avec le besoin de changer de cap, je suis persuadé qu'un ailleurs m'irait bien, même si la ligne s'amenuise, qu'un barbu me hurle dessus, que je ne puisse pas basser pour décharger mes lourds bagages -mais j'essaierai quand même de passer puisque je suis moi et têtu à la fois - avant de me rendre compte une fois de plus que je me suis trompé de pays, de continent, de planète.

Je viens d'un autre système que le vôtre disait Léo, te souviens-tu? Enfants alors nous jouions tout prêt de la chaîne et notre père l'âme emplit de poésie et de tendresse se déferlait en moi sans que je le sache. Tu m'avais bien gardé de n'avoir pas suivi la même voie(voix?), au dernier moment tu avais bifurqué me laissant seul avec Léo et cette solitude à la con. J'ai roulé ma bosse dans bien des mondes pour devenir passéiste. Tu devins mère et le monde semblait finir à ce stade. Nos vies interrompues alors, moi dans la mort et le sang, toi dans la naissance et le sang. Eros et Thanatos d'hémoglobine, il se peut que tu m'aies transmis un quelconque virus qui produit l'effet inverse, consulte ton médecin au plus vite pour tes enfants et laisse-moi une nouvelle fois te lire l'avenir...

Je serai donc roi, un roi d'insensés qui se cherchera dans chaque pas. Tu seras sainte, mère éternelle, symbole de pureté, de famille, d'honneur et de patrie. Qu'on m'empalle alors m'importera peu, qu'on m'écrase sera une rigolade. Je peux bien devenir le fou du roi si ça t'amuses. Je n'ai pas peur d'avancer avec le sourire et de m'en prendre plein la gueule, car où le soleil se lève il me faut une couche. Car quand le soleil s'éteint il me faut lutter. Car mes dents et mes griffes me protège, et c'est pourquoi je ne rendrai pas la vie ni aujourd'hui ni demain. Et c'est pourquoi je lutte afin de t'égaler, de suivre tes pas, chère soeur, douce soeur au regard d'acier. Je sais que je vais y arriver avec obstination, crois-moi.


De toi à moi, je vous rends bonheur, à toi et aux p'tits!


(ces quelques mots proviennent d'une dernière lettre de F. à M. découverte un soir de décembre 08, jonglant avec les mots et les expressions j'en ai fait ma propre sauce afin d'en servir des intérêts étranges. Ne m'en veuillez pas si je ne parle point de moi, j'ai encore bien mieux à faire ce soir et pire encore. Il vous aime tous.)

408. profil bas


On cherche toujours à dompter les vieux démons mais rien n'y fait. On court contre sa nature mais elle finit par rattraper l'homme que vous êtes afin de mieux vous bouffer. Sombrer pourquoi pas, mais sombrer c'est devenir navire apeuré et ça romp une autre promesse: ne jamais baisser les bras. L'espoir alors, se sortir de cette flotte, agiter les bras de toutes ses forces pendant que les deux sont valides. Battre des pieds. C'est fou, c'est un tout, c'est un combat où chaque millimètre lâché est un saut de géant vers l'abysse. On écoute la sirène lointaine du port, celle qui guide les navires. Même elle se sent perdue au milieu de cette tempête, de l'eau salée de toute part sur la terre comme au ciel. On aimerait pouvoir la guider, elle est aveugle, elle ne sait pas où porte la voix qui appelle tellement l'écho grondant des vagues affluantes alors elle appelle. Vous lui dîtes adieu d'une main solennelle au dernier moment, et puis c'est le dernier instant. Vos yeux grands ouverts sous l'eau, le néant, plus rien. Juste quelques nageoires qui caressent lentement votre joue. le temps s'arrête, ce temps si beau qui dure une éternité, qui semble flotter une éternité tout autour et dans vous en suspension...

L'espoir salvateur vient enfin du dessus, le vieux loup de mer qui connait par coeur le mouvement de l'eau vous repêche, il vous rebricole tout ça et s'en va sans aucune fierté. il a fait ce qu'il jugeait bon sans vouloir en savoir plus, ni moins. Il accepte votre merci mais s'enfuit déjà ailleurs, lui il sait que personne ne viendra le repêcher et c'est très bien comme ça. Alors dans la nuit qui bourdonne ces galeuses promesses vous voyez cette petite embarcation qui reprend la mer, une vague et l'embarcation n'est plus. On ne sait pas si elle reviendra demain, l'ange s'en est allé. Vous êtes juste là comme un con, trempé de la tête aux pieds. La seule chose que vous vous dîtes sur le coup c'est "putain, j'ai froid!"

04/01/2010

409. scandale mélancolique



L'écriture d'un scénario dans la poche qui commence, un travail se termine, un voyage s'organise, une opération de prévue racontée à personne à même les arbres, la cime, encore et toujours puisque tout se passe en haut, on est contrôlé par en-dessus. ça va ça vient et ça descend. Eternité, qu'on me rende mes plages, ma rédemption sera prolifique bientôt ou ne le sera pas. Je fume une clope sur le balcon en attendant que la caravane passe, et les chiens qui aboient dans le désert sont morts de faim depuis longtemps, c'est là l'unique vérité révélée qu'il faut prendre avec des pinces. Je suis là actuellement, demain je ne serai plus. Raymond Devos disait : "..." et puis c'est tout. J'écris en cueillant des papillons, quelques bouts de phrases volés ici et là tels les fragments de miroir de mon cerveau, je ne suis plus qu'un putain de reflet mais ce n'est que ma propre volonté ne vous inquiétez pas. J'essaie de me défragmenter, de m'analyser point par point et tout remettre en ordre. ça fait un bien fou vous pouvez pas savoir de tout changer, l'air et le corps, l'intérieur et l'extérieur. On commence par ranger sa chambre et on comprend qu'on a rangé sa vie.




on se verra dimanche t'auras ta robe ou pas on sentira l'indolence à chacun de tes pas.

03/01/2010

410. il m'aime


Ce que disait Sarah à l'encre de chine. Une clope. Le regard tourné vers l'extérieur à attendre que la vie vienne. Tout cela il ne faut pas, il ne fallait pas. Gaspard a encore du sang sur les mains. On l'oublie. Tout le monde ignore qui est Gaspard, ceux qui le connaissait ne savent pas ce qu'il est devenu, peu de gens le savent. La mort est un fardeau bien trop pesant.