Pages

29/11/2009

444. dans les yeux de Nadège à travers les plumes




Ce matin j'ai vu mes deux seins pousser au travers de la toile et un sourire qui illumine ma journée. Un baiser, juste un baiser à lui offrir afin de le faire languir de me revoir. Je me sens belle et heureuse. Comment je dois me coiffer? la raie au milieu ou sur le côté? Paraît que c'est mieux en arrière mais en avant c'est pas mal aussi, ça me donne un côté punk.


Finalement je sors de la douche après une heure et quarante-cinq minutes seulement, j'ai plaqué tous mes cheveux sur le côté droit genre looney tunes qui vient de se faire décoiffer par une sonnerie. Les habits c'est un peu plus dur, il faut préférer la culotte de grand mère et la gaine pour se soutenir, ravaler le tout dépassant derrière un soutien-gorge noir tagué Pucca. Un pantalon ou une jupe? Le pantalon me tente, y'a ce jean que j'adore mais aussi cette belle jupe en soie qu'il m'a offert pour fêter nos un an de folie commune. Aller, je mets les deux c'est plus marrant. Mes chaussettes blanches à rayures oranges (à moins que ce ne soit le contraire) et une converse noir. Une ballerine à l'autre pied. J'aimerai préparer un discours pour lui: je me donne à toi par la moitié de moi que tu trouveras sexy, l'autre tu n'auras qu'à la donner au chien.


Je sais qu'il me voudra toute entière de toute façon. Auto-reverse et caramel mou -faut bien que je place une explication surréaliste à mon étrangeté quelque part!


Le haut, c'est toujours en haut que c'est délicat, trop court on verra mon ventre et il sera jaloux. Trop bas il sera obligé de se pencher sur moi pour finir de me voir. A mes genoux c'est pas mal, je lacère cette robe au format adéquate, ça penche plus à gauche qu'à droite et derrière c'est moche mais je m'en fous. Est-ce que mes fesses sont bien mises en valeur? Je ne sais pas et je m'en fous, il m'aimera comme je suis un point c'est tout. J'ouvre un peu le haut improvisé au niveau du col, je recolle un bout de tissu blanc. ça me fait pouffer de rire devant ces illustres inconnus, j'ai le haut d'un prêtre et l'étrangeté d'un ailleurs. Finalement non, je ne vais pas parler tout de suite, photocopier des paroles. Copier/coller. C'est bon, je n'ai que deux heures de retard, il est habitué à pire encore. Je finis par le maquillage pomme verte et cerise-griotte. Un peu de bleu sur le nez. Masque de guerre pour partir à l'attaque, la lettre dans la main; que dis-je, le livre! Mais avant de partir, lunettes ou pas?


Faisons les choses à moitié alors, choisis le monocle ma belle! C'est tellement plus classe que t'aurais aimé posséder une fine moustache inégale, hein?


Aller ma vieille, roulons sans permis jusqu'à lui, il est dans les bras de Lille-Flandres, je le dégagerai facilement de cette putain en l'embrassant. Je suis obligé de grimper à lui songeant que meeerde, y'aurait fallu des talons pour l'embrasser! J'ai oublié mon chapeau pointu à la maison, masque de clown, il me dit qu'il m'aime. Je lui tends le livre, je précise en préambule que je ne parlerai pas avant qu'il en ai finit la lecture. Il s'étonne.


"Quoi?? Mais y'a 1502 pages!"


Bon c'est vrai j'ai un peu abusé. Mon amour je ris de toi, je suis heureuse que si tu me prends dans tes bras, alors je te montre ce qu'il faut faire. Je me glisse entre toi et toi et bien calée j'éprouve enfin le besoin de m'expliquer tout bas.


"Qu'y a-t-il?" merde j'ai oublié qu'il était un peu sourd, que la route se situe à côté et que les passants ne veulent pas changer de trottoir afin de nous laisser seuls au monde et heureux simplement. C'est parfois chiant à mourir la vie quand elle ne fait pas ce qu'on attend d'elle.


Je me retourne sur lui, je me fous le plus haut possible sur la pointe des pieds ruminant que vraiment j'aurais dû prendre des talons hauts. A son oreille tout est plus simple, je n'ai plus qu'à lui chuchoter la vérité.


Je t'aime grand fou.

28/11/2009

445. sans titre


"et que faîtes-vous là au beau milieu de la nuit?

- Je n'arrivai pas à dormir.

- Que faisiez-vous?

- Je suis venue vous voir, et vous?

- Je me suis enfui. J'ai compté les âmes du quartier pour mieux les coincer afin de les dévoiler au public.

- Et comment s'y prendre, pour dévoiler les âmes?

- On ouvre les yeux et l'on attend de dévisager avec le coeur ou la bouche. Parfois l'on croise des âmes connues de tous, parfois des assassins refoulés."


Passer la nuit en compagnie de Mi-mi.

Ne pas me dévoiler, à aucune de ses moitiés.
Me laisser croire un autre pour un cours instant.

Je suis votre homme en pareille situation.


"Alors vous avez vu qui? ou quoi?

- J'ai vu la vieille femme du dimanche remontant ses courses, les cabas dans chaque main elle hélait le bus d'un signe de tête. Hanane et ses romans qu'elle écrit, qui aime quoi, qui finira dans les bras d'un autre pour un(e) pas pareil(le) qui a su les décimer. John est pris aussi par son travail, la nuit il peint pour son propre plaisir et...

- Ce n'est pas des âmes ça!

- Vous avez raison, je vais vous en raconter une bonne sur le voisin du dessus, une vraie âme. Il n'a pas son semblable pour aimer, il vit de littérature en art de la peinture. Il rêve en musique des scandales de liaisons outrageuses avec des femmes étranges. Quand il voit des films il est capable d'en pleurer, de s'en énerver, de s'en foutre. Il vit en haut mais il pourrait très bien vivre en dessous car sous la terre se cache ceux qui hibernent, ceux qui ne savent vivre. Il ne sortent pas au grand chose et sais-tu pourquoi?

- Non?

- Car ils se sont décidés de ne pas nous pervertir autant qu'on pervertit leurs idéaux."


Et c'est magnifique de vivre pour un instant, rien qu'un instant pour elle.
Et c'est drôle de vivre tout simplement.
Sans faire marche arrière, savoir qu'on fait une erreur à se déguiser en autre.

Alors je continue de me croire autre, de me savoir autre.
Je suis un autre, un tout autre, un pas pareil.

Je suis le silence dans la cave.

Je suis mon propre démon quand il se faut bien d'inventer une vie de faussaire.

Nous avons tellement de vies encore à accomplir.

25/11/2009

446. apocalypto


Je ne suis plus seul sous la couronne. 20 000 possibilités et autant d'îles à habiter. Ma chère et tendre épouse, envoyez-moi danser s'il vous plait. Apprenez-moi les rues et les horizons. Je vous apprendrai la douleur personnelle, le sado-masochisme en échange. Je vous prêterai volontiers à tous les hommes de ma famille s'il vous faut plus de détails.


Et Gaspard aussi est un fantôme, et Livia aussi est un fantôme, et toutes les âmes qui vivent, tous des fantômes. Voici l'ère des brumes. On allume le vieux poste de radio, on croit danser, on sait que tout recommence, qu'on ne peut changer l'homme. Nous devenons nos propres démons bien trop souvent à notre goût. Pouvons-nous vraiment boire à en oublier les démeurants?

24/11/2009

447. "le verbe refouler, c'est le mot fourre-tout du XXe siècle".


J'ai enfoncé la lame dans son ventre. Elle n'a pas crié. J'ai dit: "je vous aime. Je voulais seulement connaître votre prénom." Elle est tombée en murmurant avec un rictus: "Vous avez une singulière façon de demander aux gens comment ils s'appellent." C'était une mourante très civilisée. J'ai dit: "allez, dites-le!" Elle a dit: "Plutôt mourir." Ce furent ses dernières paroles. De rage j'ai lacéré son giron de coups de couteau. Peine perdue, elle avait gagné: elle était morte sans que je puisse la nommer.


Cosmétique de l'ennemi d'Amélie Nothomb au visage refoulé.

23/11/2009

448. "il avait tant d'humilité qu'il pouvait se mettre en dessous de tous, mais non pas se mettre à l'égal de quelqu'un" les fiancés de Manzoni



J'aime bien voir John dans cet état, la mèche rebelle qu'il replace sur son front en souriant, une jambe prenant appui sur la chaise et debout il pose alors le livre sur cette même jambe pour gueuler dans la salle:





"Il se leva et alla boire du vin dans une jarre. Il se tenait debout, la tête renversée en arrière, et Ann regardait la manche de sa chemise. Vide. Sans doute était-il plus attaché au bras qui était parti qu'à celui qui restait.


- Vous étiez déjà contre Franco, ensuite contre Hitler, et maintenant contre Staline. Est-ce que ce n'est pas...démesuré?


- Oui, je manque de moi-même. J'ai toujours eu beaucoup de mal à me présenter aux guichets de la vie et lui dire: je voudrais ouvrir un compte personnel. Mais cette fois...


Il revint s'agenouiller auprès d'elle: de toutes les façons de bâtir, le cri de la femme aimée ira toujours porter plus haut que les cathédrales la gratitude et la piété d'être un homme.


- Je voudrais vivre sans fin au zénith de ta voix, comme ces balles à la pointe extrême du jet d'eau qui ne retombe jamais. Pourquoi ris-tu?


- Parce que c'est assez drôle, cette façon de bâtir un monde meilleur, dit-elle."





Il annonça ensuite le chapitre XII mais je n'étais plus dans la même pièce, corps et esprit se rejoignaient, on chassait les mouches dans la salle de bal sans faire de traces sur le tapis. Nadège avait envie de danser. J'étais là, assis dans un coin de cette grande salle drapée et les mots de Romain Gary dans les clowns lyriques m'avait bousculé. J'ai pris mon téléphone, j'ai composé le numéro étroit d'un inconnu pour lui annoncer que ce soir je venais de mourir également d'intelligence dans les règles de l'art.
(P.s. photo issue du blog de Boulet.org)

22/11/2009

449. nos jeux demain me feront rire


Tirage de gueule exemplaire, elle a laissé de côté son amertume à la porte de la maison. William disait que c'en était fini de moi, il rigolait de son double qui me racontait le futur, la technologie, ce qu'elle veux et non ce que je veux.
Dis-moi si... mais sa phrase à elle restée en suspend ne trouva pas de fin.
J'ai bu mon whisky coke en levant les yeux en l'air. Tirage de gueule exemplaire. Elle délaissa les ducs et les princes, elle s'ennivra pour s'oublier, elle ne me méritait pas ou l'archange sur son socle n'a rien à foutre de ce côté-là de la barrière. Bienveillance inutile, c'est plutôt de l'autre qu'il faut se méfier. J'ai toujours tendance à être trop niais dans mes accoutumances.
J'ai envie d'une nuit dans ses bras pour sentir la vie battre, ne serait-ce qu'une fois, la poussière sur un tapis. Tirage de gueule exemplaire à elle qui braillait avant qu'on peut délaisser les tulipes mais pas les cerisiers; je n'en ai pas la moindre intention. Rendez grâce à l'anoxerique, je ne me laisserai pas avoir ce coup-ci. Et puis finalement je me suis expliqué clairement:

"Mon ami Gaspard a un jour aimé, il se souvenait de ce mois d'août où il a du faire la route sans elle. Il chantait dans les rues ivres qu'il n'était qu'un con, je me souviendrai toujours de ce refrain. Dit-moi qu'elle est partie pour un autre, mais que d'autre que toi il n'y en aura pas! J'avais du mal à me faire à cette idée étrange de la solitude de mes amis, avais-je chopé des degrés d'alcool par je ne sais quel miracle dans son désespoir? Peut-être. J'ai donc remonté cette avenue où certains racontent qu'on a vu, parait-il, un ange prendre son envol. Gaspard est parti de ce bitume depuis or je ne tiens pas à rendre des comptes aux autres. Il n'y a jamais eu des anges sur terre ce n'était que des vieux renards fatigués avec quelques plumes."

Et puis finalement la viande est bien meilleure crue, beaucoup plus tendre. Il faut se baigner dans le sang de nos victimes et trancher des têtes avant que l'on coupe la nôtre. Les deux visages en face de moi ont disparus depuis si longtemps que presque une journée vient de s'écouler. J'ai la mémoire qui flanche, mon amour, redit-moi comment on fait pour jouer s'il te plait.

L'innocence c'est par là: http://marcfelten.com/

16/11/2009

450. "dis-moi" dis "moi"


J'ai vu l'enfant qui, comme dans un film d'Arrabal se penchait à tes genoux et racontait sans mentir que sa maman est la plus belle de toutes les mamans du village, de toutes les mamans de la province, de toutes les mamans du monde.

Il ajoutait "tu es encore plus belle que la sainte de l'église!"

Toi tu souriais en prenant dans tes mains son visage d'ange afin de mieux le remercier d'un baiser, et je te voyais déjà descendre en sainte du ciel, un cigare fertile sur les lèvres.

451. Soi-même entre ses bras, entre ses bras on couche comme en un château




C'est marqué quelque part entre tes cuisses fraîches jeune fille, made in... et le copyright. Numéro de série à la base et code barre tatoué sous l'aîne. On joue au jeu du maître et du soumis? Je commence. Je suis à quatre pattes devant vos pieds, je rampe tel un vulgaire vermiceau. Me vois-tu lécher la merde de tes bottes? J'aime me détruire à ce point, faîtes-moi mal, redîtes-moi encore ces longues douceurs du silence. Parlez-moi d'amour.


Chemise brune et regard sale j'ai froid. Je suis en laisse, votre chien lépreux de bonne séance, redîtes-moi encore tout ça. Vous savez ce que j'aime en vous? C'est votre domination aux gants de cuir. Journée-nocturne, on se le mangera et faudra faire avec. Le poulpe en séance, toujours toujours toujours. L'avaler vivant. Hum, c'est bon/mauvais.




Ennivrante passion du taille crayon dans l'orifice, laissez mes énergies couler jusqu'à ce point de limite navrant. Je suis donc j'ai mal. Simplement orgiaque, je vous laisserai planter vos dents où vous voulez. Jusque dans les fines parcelles de ma peau il y aura des traces de vos griffes. J'ai mis du sang à sécher aussi, c'est là, sur l'étendage.




liberté? Halléluia.


La liberté n'existe que sur vos lèvres j'en ai perdu le sens. Il y a longtemps que je rêve de me faire détruire par vous. Ce fantasme à commencé bien avant ma naissance, je n'étais qu'à peine formé dans le vagin de ma mère. Marina où es-tu? Divine femelle alphabétique, pute au niveau moléculaire, tentatrice du minuscule, délabrée de l'amour. J'ai encore mille insultes à te chuchoter dans le creux de l'oreille, je préfère partager le bec et le sang lors de nos entretiens. Marina, où es-tu?




Le territoire des sens à l'envers, on remonte le fleuve de sang. Nouvelle épreuve qu'il commence, réssuciter à partir de vos douleurs infligées. Pour ça il vaut mieux mourir à volonté, alors donnez-moi le coup de grâce.




"Gaspard est mort.


Tu es mort.


Je suis en vie, moi et toutes les autres."




Alors ainsi on aime les calembours de la fin?


Me voici à l'heure de ma mort.


Me voici aux portes de la renaissance.
Porté par les épaules; dernière mutilation forcée.


On coupe le coeur. On arrache les organes internes. Il faut se dissocier de nos concepts refoulés pour créer de nouveaux complexes. J'ai le complexe alors de l'amour, de la mort, Eros et Tanathos, je reviens de loin je reviens de tout. on se le mangera notre petit monde. On bouffera des comètes au petit dej. Ouais.




Soleil levant soleil tournant, il faudra attendre la fin de la nuit. Quand le soleil aura avalé toutes les ombres de nos peurs. Qu'il sèchera le sang, qu'il pansera mes plaies. On enlèvra la laisse autour de mon coup. On me démenotra. Pour mieux me perdre alors dans le bonheur d'un monde nouveau, d'une nouvelle air. Dans mes fantasmes de réalités. Dans mes multiples vies. Dans mes multiples moi réorganisés et amalgamés en un seul forcené: l'homme-nouveau.




Un jour je lui expliquerai pourquoi il y a sa photo dans mon bocal de poisson.

15/11/2009

452. se souvenir des grenouilles et des passe-droits


Elle avait les cuisses fines et accueillantes. Fiona et ses chaussures trempées qu'elle a déposé au pied de la maison de Gaspard le temps d'un ébat. Elle avait le silence aussi dans ses creux. Et Gaspard n'est qu'une gueule béante. Dès lors c'est tout un foutoir dans mon crâne, j'ai annoncé à l'homme d'un autre couple ces mises en garde spéciales:


"faîte gaffe mon bon ami, la jeune femme cache alors les griffes d'une lionne, elle n'attendra que l'ombre pour vous croquer sans détour. Alors ça en sera fini de vous et de vos illusions de tranquillité, elle se jouera de vous, vous en mourrez sans doute. Alors vous vous rendrez compte des épreuves que j'ai enduré pour parvenir jusque là et vous vous en prendrez au suivant, le mettant en garde à son tour."


Mais nous savons que la réalité n'est pas ainsi et que le malheureux ne sera jamais comblé de son désir de vengeance, où alors il deviendra Bête à son tour.


Mademoiselle je suis fou de vous.
Mademoiselle? je suis fou de vous.


Mademoiselle.
Je suis fou de vous.

Fou de vous. Fou de vous.

14/11/2009

453. jeune homme cherche son identité relative


C'est pas vrai c'est pas moi. Je n'étais pas là j'ai bien menti peut-être un peu trop. Le bâton m'est revenu dans la gueule ça m'a surpris. Alors il fallait que sa revienne aussi fort?

Ce n'était pas vrai ce jeu incessant perpétuel du qui aura raison. On devrait pas continuer à se détruire? Je crois que si, mais j'ai laissé échapper l'occasion d'avouer mon meurtre. Au commissariat ils m'ont choppé, je devais avouer mes multiples moi. Et leurs actions, et leurs actions...Alors pourquoi? C'est pas moi de toute façon. Je n'ai pas tué pas volé pas menti. Je suis blanc comme neige et je t'en veux de ça.


Je veux partir, filer à l'anglaise.

J'veux partir d'ici ne plus rester...


Puisque le monde est parfois insupportable pour un fantôme livide aux identités multiples.


(C'est la faute aux fusils c'est la faute aux idées).





P.S.: à bout de souffle, sans amour en lien dans le titre.

09/11/2009

454. l'âme en déroute


Je me souviens, la neige qui tombe mélangée à la pluie. Déjà le blanc avait viré dans la journée, tout semblait fondre. Ce soir-là j'ai pris ma voiture énervé, pas encore de pneus-neiges. Rouler à fond jusqu'au rond-point, tourner à gauche, continuer jusqu'à l'autre rond-point puis tout droit. Au croisement, prendre la première à droite, braver le panneau qui dit qu'à cent mètres tout finit pour cause de travaux. Au-delà, y'a encore cette toute petite route, la voiture prend toute la place, pourtant elle est à deux voies. Au stop continuer tout droit, ignorer la puie qui cingle ton pare-brise, remettre Bashung en boucle sur ton poste. Même chanson. Continuer jusqu'au deuxième stop, tourner à gauche dans la petite descente. Le fleuve qui passe au-dessous du pont, tu t'immobilises un instant pour voir les remous de cette eau glacée, imperturbable, qui élève tout autour de ton véhicule un brouillard lugubre. Te souviens-tu plus jeune t'être arrêté sur ce pont, avoir jugé l'eau d'une manière radicale pour te noigner dedans? Tu as renoncé bien sûr, mais une parcelle de toi se trouve encore dans ces eaux à cet endroit. Elle est bien fichée dans la vase, entre les rochers, sous l'eau grise-marron-noir. Flots, remous, vaguelettes à l'âme, tu as sauté dans ton phantasme je ne t'en veux pas ancien-moi. Il faut continuer, tu vois dans la lumière de tes phares cette pluie-neige qui tombe, elle inonde le sol. Les néons dans leur lumière orangée-prune volent tout autour, après le stop tourner à gauche puis prendre la première à droite immédiatement. Remonter la rue sans t'arrêter devant l'écriteau qui hurle sur ce sol baigné de froid "nous n'avons fait que fuir". L'hôpital en face qui ne sert plus à rien, les locaux décrépissent, tu tournes à droite près de la fontaine. Tout droit jusqu'à la bibliothèque. Se garer devant, être revenu là où ça a commencé avec la même musique. Couper le contact, éteindre les feux. Ecouter les dernières paroles. Je lève les yeux du côté de ma fenêtre, les étincelles du ciel tombent de part en part, c'est beau à la lumière de ce reverbère, il manque plus qu'un piano pour se croire dans un film noir de Jacques Audiard. J'enlève la clé à la dernière note, j'ai froid, je referme ma veste, je regarde en l'air. Il ne se passe rien.

455. au temps des muets le fou avait une longueur d'avance sur le silence


Il y avait le feu brûlant qui s'éteignait, ces peurs qui galvanisaient les troupes n'étaient plus présentes dans leurs yeux. En 2002 ont a rouvert les plaies, on a écouté les barrières, on a fondu les murs entre eux. J'ai tant prié pour que cela existe que je ne veux pas imaginer d'autres villes en ruines, des mondes en flammes ou encore des apocalypses qui ne viennent pas. Mon désir est de vous voir entre les draps de Morphée dans le grand cerceau de la vie. Ne pleurez pas dernière femme si je vous dit que je ne suis pas le dernier mais le premier, avec le désir d'être le dernier des derniers je suis devenu un peu trop dernier. A mon goût la farce est une plaisanterie excellente que Kundera ne cacherait pas à son public de vieux liseurs, il reste encore dans le boudin ce vieux goût de pommes aux caramels, j'écris à l'instant les idées qui me passent par la tête, ne m'en veuillez pas si c'est toujours confu ainsi.


Gaspard sur un nuage, Gaspard qui plane. Comme un âne. Son âne ira au Paradis c'est certain. Gaspard et moi c'est un peu Sancho Pança et Don Quichotte non?


J'ai vécu bien des vies avant de te trouver joli fantôme, je n'en suis que plus heureux quand les dernières cloches de la messe sonne de ne plus être seul pour affronter les menaces de l'envers du décor, pitié, faites que cet amour triomphal dure plus longtemps qu'un bocal de poissons rouge.

08/11/2009

456. provocation n'est pas un joli mot, je préfère encore voir les rivières dans les cheveux de Nadège ou la couleur affriolante de ses yeux sur moi


Ultime provocation, se découper en petit bout de terre.
Les rires s'allument dans les brasiers. Thermostat 7.
Poète? vos papiers! Ouais, j'ai le délire dans la peau.
Le goût du sang dans mes gencives. Je saigne parfois.
La vengeance est un plat qui ne se mange pas, disait mon père.

Petits bouts de cartons découpés. On repasse les étoiles à l'envers.
Gaspard n'est plus Gaspard. les peintres ne sont plus. S. la haine.
Petite haine galopante, tournicotant dans ma caboche.
J'ai mon médicament, Choubidounosore. C'est mieux que tout.
Trois cent milligrammes par prise. A avaler sans arrêt.


Détruire, détruire, détruire.


Des échos dans la voix, les rimes s'accélèrent.

Où es-tu petite étincelle de vie? Je suis là.

Où es-tu petite luciole? Je suis là. Toute proche.


Les jumelles au fond du jardin comptent jusqu'à cent. On dit:

"le monde ne tourne plus rond depuis qu'on sait qu'il est carré".

Toute vie est préservée inévitablement, lyriquement.

On consigne dans le grand carnet des espèces nos moindres faits et gestes.

Poète? Vos papiers? Oui là voilà. On recommence...


Singe. Ok.

Homme. Ok.

Loup. Ok.

Cabot? Ah tiens...


Rhinocéros guette dans son pyjama.

Corne unifrontale. Bruit de soupe.

On lèche les loupes. On guette les troupes.


Blog encore. Blog pour écrire. Transvaser sur le papier.

S'il faut écrire mes petites folies sombres je suis partant.
Ecrire la vérité en petits bouts de carton calcinés. Si si.

Se dire encore que oui, se dire encore que non. Le privilège.
Cet instant est un privilège brut. J'écris la vérité.

La vérité se tient dans mon froc. La solitude n'existe pas.
On vit tous avec nos fantômes. On déraille tous.
Sous ecstasy ou sous couverture, dans les bras d'un moins pire.


La vérité.

La vérité.


Quelques poteaux en mémoire. Mon chien vendu.
Mon chat est un parvenu médiocre naïf.

Trois petites notes de musique.

Libellé monsieur libellé.

La solitude pour quoi?

La solitude pour moi.

Tout ça est fou.

Ainsi c'est...

Ah ben...

oui...


Je plains Marilyn Monroe dans son cercueil en argent.
Je suis fou mais elle elle est foutue. Ah ah ah.


Mon cerveau est une petite météore.
Semblable a du verre brisé. Chaque morceau reflète une idée.
Etalée sur le sol elle lance des traits de lumière en pic.

Quelques moisissures. Se laisser aller.
Encore plus. Mon cerveau est éclaté ce soir, en morceaux, éparpillé. Je l'avais confié à ces deux démones sur Elm Street. J'ai dit "gardez-moi ça, je reviens de suite" mais ça c'est pas passé comme ça. J'ai avancé dans le refuge. Les pieds dans la neige structurée, chaque pas m'avance dans les ténèbres. La route enneigée, la voiture au bord de la route disparait. La route bientôt. S'avancer bien en face, le chemin qui passe à gauche du chalet. La montagne bien en face. Les ombres grises du froid, ce brouillard troublant, je le vois qui descent un peu plus. Plus rien n'existe après son passage. J'avance toujours en montant du point A au point B. Sentiment de fatigue. Une bête étrange galope tout autour de moi. Le poil noir indéfinissable. Pas de queue, plus large qu'un loup, sans yeux, juste des dents. Elle se déplace comme une panthère, stoppe parfois son élan. Le néant m'enveloppe alors. Dans le gris il n'y à plus que la bête, la neige, une pierre, un sapin recouvert de neige et moi. Nouvelle avancée, il n'y à plus que la bête, la neige, une pierre et moi. Quelques pas de gagné. La bête. La neige. Moi.


Et enfin. La bête. Moi. C'est tout.

07/11/2009

457. elle devient de plus en plus (révélations en spirales)


Je sais bien que le monde peut s'écrouler tout autour, la neige quand elle tombe le soir et qu'elle réchauffe alors la terre humide l'enveloppe littéralement dans un habit lourd de circonstance. Regardez bien, 150 mètres tout autour il n'y a plus rien, vous vous trouvez dans le néant. Petit bout de terre mouvant dans le néant et j'aspire à être plus ouvert encore d'esprit. On a vu des types sous la neige dont l'esprit méditant s'évaporait par les pores de la peau. Il s'en allait bien loin, au-delà de la frontière du néant. Sur d'autres terres, plus virtuelles encore que votre écran de pc. Et ce monde est peuplé du Nous intérieur, chaque pas ramène vos pensées à ce vers quoi vous vous tournez. Il est inutile de mettre en garde le nouveau voyageur que ce jeu n'est pas sans risque suivant les pensées colossales que l'esprit habite. Elles peuvent bien être dangereuses, c'est alors dans votre prison que l'esprit s'étiole, le corps lui gèlera sur place parmi les flammes de l'enfer. C'est possible aussi d'atteindre le nirvana, mais le jeu est-il bon de partir avec le sourire dans un paradis fictif loin du sensoriel? A vrai dire je ne sais pas, je vois ça à l'image de ces grands naufragés de la vie qui aimeraient aller dans cette direction. Ils se réfugient alors dans la drogue, loin de tout, nageant dans le bonheur tel le poisson dans l'eau. La redescente est infernale, la replonge inévitable intervient. Mais celui qui médite oublie parfois la véritable beauté de ce qui nous entoure, il ne peut palper le réel, se laisser submerger par les sens. Quand un corps demande à vivre, qu'en fera celui qui ose méditer là-dessus? Rien. C'est bien là le problème. Il faut parfois se laisser submerger de tous nos sens.

06/11/2009

458. apprends-moi à voler, jouer avec les anges, contempler le corps du cuivre incertain qui joue


J'ai connu un fou autrefois qui parlait aux étoiles et buvait l'eau de la mer. Il était beau dans sa mocheté de sans domicile fixe, les cheveux gris et crasseux, les yeux bleus-reflets d'eaux tourmentées, la barbe crade des derniers repas. Je traînais plusieures heures dans son atelier, le plancher qui craquait et les ombres qui le gagnait à certains moments de la journée rendait l'atmosphère pesante, étouffante presque. Je voyais alors la poussière bouger, ses yeux rapetisser à mesure qu'il prenait l'eau, et assis sur le sol il me semble m'être endormi pendant un quart de siècle à l'ombre de cette cathédrale de bibliothèque qui cachait aussi bien des classiques que du récent, des peintres aussi par millions ou encore des livres servant à écraser les blattes entre les lattes. La dernière fois que je l'ai vu il avait une chemise blanche sans tâche, ses lourdes mains collaient à la toile. Il ne voulait jamais me montrer ce qu'il faisait. Une fois fini il accrochait les toiles à l'envers sans les montrer. Il écrivait alors d'une main désastreuse liée à son écriture incertaine ce que la toile signifiait pour lui au verso, à même le châssis. Du coup les châssis se parraient de mots plus ou moins beaux, descriptifs ou non, il y avait un "beau paysage" suivi d'une "once de pluie sur l'océan en deuil" suivi du "temps du retour". A l'éternité ça continuait comme ça. Il parlait d'une voix bousillée, des connotations graves sur les consonnes aigüs qui disait: "j'ai le sentiment que la meilleure peinture c'est celle qu'on ne voit pas. En accrochant des toiles à l'envers le spectateur imagine alors la perfection qu'il désire ou non et peut ainsi penser par lui-même si ce que je fais est bien ou mal. Original ou non. Je livre mon meilleur combat pour eux et j'espère qu'il y aura un juste retour des choses!"

Mais je ne lui connaissait de spectateurs que sa femme, Gaspard et moi. Il n'avait ni fils ni patrie et m'expliquait les couleurs en notes de musique. Ses cheveux composés des restes de la sueur acharnés mêlée au reste de toile accrochée (quand il s'endormait sur son travail) s'agitaient pleinement, et alors la porte de l'enfer pouvait s'ouvrir: "on ne mélange pas un bleu aussi chromé que celui-ci avec de la simple terre de sienne, nous ne sommes pas Manet enfin!"

Un jour il a peint Gaspard, derrière c'était marqué "portrait de l'homme à la tête éclatée" s'il savait quel prophétie il avait commis...


J'ai repris un peu plus tard mon accordéon, je suis reparti sillonné les routes à la recherche d'un oubli. Cet espèce de Nicolas Bouvier poético-abstractif je ne l'ai jamais revu. Je n'ai plus de nouvelles. Il me vient souvent à l'idée de décrocher quelques souvenirs, j'enlève alors une étoile de mon plafond pour la coller à l'envers. Il est très tard, tout le monde dort, juste la lumière de mon salon hyptonise l'extérieur. Tout est froid, le givre grimpe aux poubelles, je suis amoureux. Le reflet de la lune reflétée sur les montagnes reflétées sur mes yeux qui s'éloignent. Ma clope se consume tout doucement, mes cheveux repoussent mal. Je suis mauvais de nature, je me bonifie avec le temps il parait. J'ai parfois envie de jouer de la musique, faire des copier/coller de notes, chanter au monde que je n'ai pas du tout l'oreille musicale mais les bonnes âmes malouines me donnent un talent que je n'ai pas alors je continue. Pourquoi pas...
P.S. la photo est un fan-art qui n'est pas de moi pour Boulet paru sur son site BouletCorp.

03/11/2009

459. les cauchemars ont gagnés et le monde n'existe plus


En se couchant dans le noir il évite les questions des autres. Il ne dira rien. Il ne vous avouera pas sa re-création sublime à travers les mots puisque c'est à moi de le faire. J'ai repêché Gaspard aux abords du monde sur les rives de l'Achéron. Mille ans se sont écoulés, de son silence j'ai modelé sa forme, de mon manque de larmes j'ai modelé sa parole. J'ai insufflé la vie en me perçant le nombril, ce geste virginal à la limite de l'homosexualité. Je ne sais plus qui je suis j'en ai bien peur. Relire les 1000 poèmes de nos mémoires fictives, lui réapprendre Rimbaud et Verlaine, Saint Exupéry et Gary, Georges Perros et Nicolas Bouvier.

Dans le rouge il en est ressorti, isolé de tout. J'ai demandé à ce qu'il me parle des papillons, des luttes aussi. Le passé c'est le mot Dieu.


"Alors j'étais sur le chemin de la mort. J'ai erré sans fin. Sais-tu que j'ai fui en Egypte? C'est ce voyage d'une semaine qui me poussa à quitter la France. J'étais seul, emprisonné. Ne m'en veux pas mon ami. J'avais besoin d'un air frais, les femmes de ta ville ne me dise plus rien, je les connais toutes, j'avais besoin de découvrir la véritable sexualité des autres villes d'autres endroits. Si j'ai fui je m'en excuse, ce n'en était pas mon intention de me dégager de mes priorités. Y'avait tant à découvrir, et un peu plus pour toi aussi. On passe de l'Egypte au Tibet, la première fois que j'ai entendu le nom de Lhasa c'était dans un restaurant. Ce type à la mine affreuse qui tenait entre ses doigts difformes un café glacé me parlait. Je sortais de cuite, je ne comprenais pas tout. Il me fallut plusieurs minutes pour réaliser que les anges protecteurs ont parfois des looks de vieux rockers sur le retour. Lui, derrière ses lunettes de soleil, au début je l'ai détesté. Il avait le pouvoir, même dans ce café refroidi. J'ai pris peur devant sa proposition, partir, partir pour où? Lhasa alors...

Je suis sorti, j'ai arrangé le col de ma veste, il faisait froid. Je t'ai appellé tout de suite."


Je m'en souviens alors, tu m'avais donné l'ordre de sortir de chez moi. Il fallait que tu me parles, tu devais prendre l'air aussi et ne pas t'enfermer dans un vieux casier scolaire.


"Ouais, nous sommes partis, coupant à travers champ dans la nuit étoilée. Je me souviens, j'avais cette clope qui fumait toute seule dans les mains, j'étais vraiment intoxicé par ça. En baissant les yeux sur mes pieds je me suis rendu compte que j'étais trempé jusqu'aux genoux. Tu n'étais pas mieux. On grelottait de froid, et je t'expliquais que pour oublier une femme il faut parfois partir très loin. Je ne savais pas que j'avais tort. Je ne savais pas non plus que tu allais devenir comme moi. Alors deux ans à Lhassa ne m'ont pas suffit. Elle était toujours là. Un an en Espagne, a fuir en continu, pas plus de succès. J'ai attendu après bien des routes et puis le reste...

Tu sais très bien ce qui s'est passé..."


Oui, je savais très bien pour avoir éxaminé le corps qu'on ramène jamais les morts à la vie. Qu'on idolatre parfois les martyrs sur des raisons obscurs. Qu'on se ment à soi-même aussi en se disant que "je ne ressemblerai jamais à..." car oui, on est à l'abri de rien. Mais il me restait encore quelques points à éclaircir, et c'est Gaspard, debout sur une chaise à faire le poirier, maître zen de la force dans son costume de lapin bleu à tête de mort qui m'apporta l'explication:


"Finalement je ne suis qu'une voix dans ta tête, je te dis juste ce que tu veux entendre, c'est cela, non?"


Et ce soir là près de ma cheminée sans feu je me suis plongé dedans. J'ai voulu périr par le feu pour expatrier ma douleur bien plus loin encore. J'ai pleuré, depuis bien longtemps je ne croyais plus en être capable. J'ai baissé ma garde un court instant. Le feu a alors commencé à prendre, et le bois crépitait...

02/11/2009

460. the only living prince in the world


Il est lieu où la beauté se mêle au monde dans une unification improbable. La chance de l'oeil avisé appelera ça beauté terrifiante. On a vu au volant d'une lupo de ces ouragans qui déposent les feuilles mortes en bouillie orange et jaune sur les bords des routes trempées. Tel le tapis qu'on déroule pour les grandes arrivées. Plus haut la neige dévaste la montagne, gagne du terrain. Le vert clair du printemps s'est changé en vert cul de bouteille. On prend les pinceaux pour croquer les dernières touches de couleur qui s'effondrent par endroits. Un glacier s'écroule. Le roc apparait, plus clairement souligné par la glace. Les oiseaux s'en sont allés. Aurevoir, les oiseaux. Ils reviendront. Dans les rues quelques silhouettes pressent le pas, bardés de noirs, habillés lourd sur pattes. Il règne dans l'air cette crainte de la nuit qui va tomber. Cette peur qui nous prend au tripes, ancestrales. Il faut du temps pour s'habituer à la nuit de 17h30, au mystère dont le sombre recèle. Quelques fantômes de l'âge de glace, quelques disparus en montagne qu'on a fait exprès d'échouer ici et là sans jamais retrouver les corps. On ne veut plus chercher, les cadavres en montagne c'est comme les amoureux, ça se ramasse à la pelle et puis on oublie on oublie. Je crois que des chimériques ombres font bien gaffe de prendre la forme des corps qu'on a connu dans les livres. Big foot est dans le coin, transformé en arbre qui s'agite. Les loups traversent les frontières, plus loin il y a passage de drogues obligatoire. Un vieux chimpanzé dans un zoo à qui plus personne n'apprend à faire la grimace se resserre sur lui-même. Le temps demeure incertain. Le soleil peut ressurgir d'un instant à l'autre. On en a vu de ces magnifiques astres qui éclairaient la nuit. Tout est possible. Rien ne se défait, tout se refait.

Un vieux junky prend sa dose à la librairie du coin, livres d'art sous la main, il retourne à sa voiture satisfait. La clope au bec il chantonne ce vieux Simon and Garfunkel qu'il a dans la tête depuis ce matin. Ca veut pas sortir, il faudra essayer la dévisseuse juste pour voir. La voiture sort du parking, sans un son à l'intérieur duu véhicule. Un assistant clap la dernière scène. Maintenant il ne reste plus qu'à coller le générique. On débranche le décor, on enlève tous nos masques. Quoi? Vous ne m'aviez pas pas reconnu dans le rôle de..? On enlève nos oripeaux hivernaux, vieilles chaussettes épaisses. Il fait si chaud sous ce magnifique ciel bleu. N. veut que je lui passe de la crème solaire sur tout le corps. Le réalisateur attrape sa planche et court se faire une vague, la mer est agitée, sublime, la houle déferle, sortie tout droit de l'enfer. Il fait beau, un peu de vent tout de même. Torse nu je m'agite, un coca à la main, à rejoindre la chambre de mademoiselle N. pour la nomination des Oscars. Oscar Wilde. Wild Cats. Cats cats cats... Tout s'agite dans mon crâne. Torse nu j'erre dans la maison, les lunettes de soleil sur le pif. J'attends le signal de la chambre qui me dira que...qui me dira quand...

En face de moi la mer qu'on voit danser...

Le bruit des vagues...

Le chant des mouettes...

Et la mer s'en est allée...

01/11/2009

461. il n'y a qu'une chose à faire, c'est d'être amoureux. De risquer de l'être. Sinon c'est la mort. (écrire est physique pour tout homme, non?)


Chemise brune j'ai froid, dans ce grand déversoir de la maison vide je suis seul j'ai peur. Ne pas se resserrer, ne pas partir, il y a tout le temps des changements. Ainsi il en va pour Gaspard qu'il me manque parfois, je parle encore à son fantôme par habitude de l'habitude. Des phrases qui ne veulent plus rien dire, l'habitude se perd quand elle n'a plus de valeur:


salut toi, comment ça va? moi ça va et toi? J'ai repensé à ce que nous avons pensé tous les deux, la dernière fois...dans la chambre aux rideaux teintés, celle de l'étage face nord. Je suis sous le mont-blanc, tu sais, et je crois que oui, le progrès n'est pas un fardeau mais peu s'avérer parfois un instrument de torture pire encore que le banquet des sadiques. Tu sais que Burroughs à écrit dans Junky que on ne décide pas d'être drogué. Un matin on se réveille et on est drogué."


Pauvre Gaspard, tu n'a plus que les ligaments sur les muscles. J'ai peur d'encombrer ton regard de trop mauvaises pensées. Il me fallait bien un personnage fictif à tourmenter, alors c'est toi. Je te jette en terre, je te sors de ta tombe, pas de repos pour les braves et tout ce qui s'essuie. Chemise brune col en V j'ai peur, ma cravate à pois m'étrangle. Immeuble de verre, je ne pense qu'à ça maintenant. Je veux que tu meurs à nouveau en te jetant du haut d'une tour en verre. C'est impossible de remourir. J'ai la marche d'un fou mais les fous ne marchent pas, ils courent, ils volent, ils sautent d'un pont sans se soucier du temps qu'il fera deux-mains. Non?


Je n'irai plus dans vos boom, c'est fini pour moi, considérez-moi comme foutu. Je ne démissionne pas de la vie pour autant, je prends un peu ma retraite pour me contenir, pour me ressaisir, et si parfois je reprends un livre inachevé dans mes cendriers c'est pour mieux m'inculquer le plaisir que j'ai à divertir.


Alors Michaux semble danser dans ma chambre: "Garde ta mauvaise mémoire. Elle a raison d'être sans doute" et les poteaux d'angle meurent à nouveaux.


George Perros colle des papiers dans coin pour la deuxième fois de ma vie: "l'intelligence tue, me dit-il. Encore un immortel."


Mais c'est les citadelles qui s'écroulent à l'assaut de l'euphorie que j'entends toujours, les complaintes gueulent, ne les entends-tu pas? Saint-Ex' fait dieu me surprend toujours de ses mots si délicatement assaisonnés: "J'écrirai un hymne au silence. Toi, musicien des fruits. Toi, habitant des caves, des celliers et des granges. Toi, vase de miel de la dilligence des abeilles. Toi, repas de la mer sur la plénitude."


Plus loin il me dira sûrement: "Silence qui est refus des vers, des parasites, et des herbes contraires. Silence qui te protège dans le déroulement de tes pensées."


Et enfin il aura grand besoin de mourir à nouveau de la même manière que Gaspard grille ses toasts: "Silence du coeur. Silence des sens. Silence des mots intérieurs, car il est bon que tu retrouves Dieu qui est silence dans l'éternel. Tout ayant été dit, tout ayant été fait."


Dans quelques épitres j'ai lavé mes pensées. J'ai bien réfléchi à vos rancunes amères qui s'ouvrent parfois au dedans. Ainsi on me reproche de ne pas avoir ouvert un livre de philosophie de ma vie, mais j'ai compris que je gagnais bien plus avec ma non-ouverture et mon coeur à lire des poésies de mots qui découlent toutes dans le même sens. Ma philosophie à moi alors c'est citadelle au petit matin, mon café et ma clope, la femme que j'aime encrée dans mes pensées: le point d'encrage de toutes réalités.


Et je ne prétends pas avoir raison de vous, j'ai déjà raison sur moi et c'est beaucoup.

462. la tête dans les choux le pied droit dans le souvenir des mines fantômatiques perpétuelles



Le monde est fou c'est certain. Chemise brune et crâne qui repousse. Barbe nouvelle. Je m'acclimate à l'amour au moment où vous mettez les vôtres en terre à nouveau (dans certains pays on ressort de terre les morts pour les laver). Je n'ai pas vraiment de mort à aller visiter, je n'y crois pas trop, et puis je suis mon propre mort parfois. Malgré tout personne ne vient fleurir ma tombe. Alors je bouge, j'essaye de sourire aux autres. Hé, je suis là, non? ah bon...

Quand elle elle me parle je me nargue moi-même, du haut de ma tour diabolique je souris, je redescend de plus en plus parmi les humains. Bientôt j'achèterai des fleurs pour un rencard, bientôt elle me sortira de là mais chut, il faut juste être patient et ne pas trop taquiner les fantômes. Sortir les vieilles photos de la guerre du placard ne sert à rien. Dire "tu te souviens à quel point je l'aimais?" non plus. Avant elle il n'y à plus personne. Ni cette salope de S. ni d'autres femmes. Je suis redevenu vierge pour elle. Dédouané du passé, c'est bien beau l'oubli. Mais le jour des morts est le plus fort, trois ans plus tôt je...non rien. Il y a toujours un "je" en suspension qui flotte dans l'air. J'aimerai me soustraire de moi. Demain je vais écrire sur Gaspard, sur Basquiat, sur les autres. Continuer mon putain de roman pour être fier du mot fin dessus; moi qui me donne l'impression de ne jamais terminer quoi que ce soit. Non mademoiselle S. je n'ai pas fini avec toi, mais j'oublie, tu vois, je crois que je l'aime plus que tout, et que toi tu n'est qu'un fantôme sorti du placard qui jamais ne lis, qui jamais n'écoute, qui jamais ne pleure sincèrement.

Avec elle c'est différent. Je te l'ai dit. Il n'y a plus d'avant alors cesse de me hanter, va t'en loin de moi même si c'est déjà fait pour ton corps. Va t'en loin de moi, laisse-moi avec celle que j'aime et qui m'aime éperdumment, je te signale mon bonheur comme je le crache à la face du monde pour le narguer constamment. A trop vouloir irriter les anges ils ont fini par me redonner la vue que je voulais, il m'ont rendu ce rictus infâme que je ne supporte qu'en face d'elle. Et dans mon goût de la vie -je n'ai jamais eu peur de la mort, tu le sais, mais je veux que ça se sache dans cette parenthèse- je veux encore apprendre les mélopées flamboyantes du désir, celles qui ne peuvent m'interdire les caresses douces. Retenir ma tête hors de l'eau pour cette danse, cette brulure au 25ème degré. Les flammes qui reviennent caresser ma joue, mon sexe, mon corps tout entier à l'envers à l'endroit. Elle vont et viennent de moi dans moi sur moi tout autour. Tu le vois mon sourire? C'est une vengeance sur la vie.


Il n'y a plus rien à fêter désormais et je n'ai rien bu. Ma gorge n'est pas sèche pour autant, mon esprit a faim de nouvelles luttes, mes doigts parcourent encore, bien plus loin, bien plus profondément que toi encore. Je suis sur son sourire, suspendu à ses lèvres, que ça te gêne ou non. Je ne te souhaite pas le malheur, juste de vivre aussi heureux que moi, le sais-tu que pour toi ça te semble impossible? le sais-tu que je suis au courant? Que la vie n'est plus derrière mais oui, devant. C'est ainsi pour les gagnants de l'univers, et les têtes blondes peuvent bien venir, ma maison du bout du monde sera assez grande. Que les âmes en déroute viennent se recueillir sur le pas de ma porte -j'étais comme eux, après tout, avant- j'ai toujours un frigo bien rempli pour ses grand naufragés. Pour toi aussi il y aura toujours de la place dans ma maison, mais pas dans ma couche. C'est le berceau des anges, mais vous qui lisez ceci ne soyez pas jaloux, et n'oubliez pas de ne rien dire. C'est un secret entre moi, elle et vous, d'accord?
Je n'arrête plus de vivre.