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24/06/2010

283. la vie ne m'apprend rien


J'ai arrêté d'écrire
mais pas de vous écrire
(La vie est une sacré fête sur réservation)

22/06/2010

284. l'enfant de la panique


ah je le savais bien - combien de destructions?

tu sembles séculaire, taillée dans la roche de ton trône

la faille alors - et c'est un remerciement

déferlement de tous les maux

que je suis sur le point de traverser

pour venir te rejoindre mon amour

il se peut que j'ai encore des doutes...

Mais se pouvait-il que dans nos

regrets

regrets

regrets

j'avais laissé coulé ce mince filet de bave

prémices des folies lointaines de notre haut-rang

car je la connais bien cette excuse madame

attention à la blessure madame

O Invasor, je ploierai sous ton poids

tricoter encore ces filets-là

ne pas devenir fou

chercher les points

joindre les bouts

morceau

par

morceau

étape

par

étape

tout est fini, y'a plus d'avant

y'a même du pire

on se souvient.


Je renaît?

20/06/2010

285. "comment massacrer mille hommes dans une salle de banquet"


et un jour, Pierre Dessons a dit:
J’entendais partout que le monde que je décrivais était unique, qu’il était immense…

ah oui merde.

17/06/2010

286. la gueule dans le cambouis au petit matin


D'une photo ressurgit un monde que je pensais renfermé derrière une lourde porte blindée.
Mais il en fallait peu, ton souvenir refleuri, je me souviens de ce moment, de ton sourire.
Alors tu me faisais rire, je t'aimais, je sens encore ton odeur, tout au fond dans l'intime. Cette odeur de me quitte pas, du soir au matin. Les premiers rayons de soleils percent la nuit, c'est ton fantôme qui s'estompe avec ma sueur glacée galopant le long de l'échine. Ton odeur.

Elle persiste à la manière de la mort galopante sur les toits de Berlin.


Ce matin je me suis levé, j'avais un souvenir de toi au fond de mon café, ça se voulait réconfortant. J'aurai tant aimé que tu me détruites à nouveau, encore plus...

287. Sérénade à l'américaine


Parfois vers minuit, vous voyez une vingtaine de grosses autos à neuf places pleines de monde et de bruit s’introduire dans une rue morte.
Ah! Ah! Une nouvelle révolution! La police arrive en courant, mais on exhibe les certificats.
Bien, ça va, elle s’écarte.
Alors les automobiles s’ouvrent il en sort des contrebasses, des violoncelles, des accordéons, des harmoniums, une batterie, les cuivres les plus divers, importants et mafflus, et naturellement des escadres de guitares.
On dresse les pupitres. On distribue les cahiers de musique. Les phares des autos concentrent sur le tout leur lumière.
Et tout le monde observe une fenêtre, celle-là ve, esta.
Tout à coup dégueule l’orchestre, et tout le quartier se réveille.
Sitôt un morceau terminé, un autre le remplace, et il y a trois orchestres et trois chefs.
Cependant, un rideau à la fenêtre a tremblé. Regardez comme il tremble. Une jeune fille est là derrière, le jour même de sa fête, une jeune fille est là, mais personne ne la verra. Après une demi-heure les orchestres s’en vont en buvant.
Restent alors le jeune homme qui offre la sérénade, un guitariste, et un chanteur. Celui-ci se met à chanter des chansons populaires avec une de ces voix affamées d’amour comme on n’en trouve qu’en Amérique du Sud, chansons si directes aussi. On devient anxieux. La jeune fille n’y pourra résister davantage, et que les parents parlent seulement de s’opposer aux fiançailles, elle va se jeter par la fenêtre…
Parfois la sérénade se donne devant une habitation parfaitement close et noire. Rien ne bouge. N’importe, on s’adresse aux murs. On est là, sur le trottoir, comme des gens qui attendent un miracle.

16/06/2010

288. When i was a young girl


Rappelle-toi Barbara, Barbie-rat,

Nous faisions l'amour entre tes draps

Et il pleuvait sans cesse sur Brest ce jour-là

Mais Brest est une foutue ville semblable à un trou du cul

Il ne se passe rien, les déchets envahissent tout, le ciel est noyé.
Ville triste, des gueules-fantômes qui n'ont plus la connaissance d'un sourire.

Et tu marchais souriante, comment faisais-tu, ne voyais-tu pas le monde tout autour?

Epanouie, ravie, ruisselante

Sous la pluie

Sous la pluie... car y'en a toujours dans ce coin-là, n'est-ce pas?


Rappelle-toi Barbara, Barbareshka,

Comtesse aux pieds nus, il pleuvait sans cesse sur Brest,

Foutue ville où je fumais sans cesse, enfermé dans mes pensées, dans ton cocon.

Je fumais en tournant en rond, je devenais fou (de toi) dans ce réduit.


Toi que je ne connaissais pas

Toi qui ne me connaissais pas.

Rappelle-toi.


Rappelle-toi quand même ce jour-là.

N'oublie pas.


Un homme sous un porche s'abritait

Et il a crié ton nom

Barbara

Il me semble le voir sous tous les porches Brestois

J'en connaissais ma fin, quelque chose

Et tu as couru vers lui sous la pluie

Ruisselante, ravie, épanouie

Indifférente également à moi, qui tirais la gueule

J'étais devenu des leurs

Et tu t'es jetée dans ses bras

Rappelle-toi cela Barbararama

Et ne m'en veux pas si je te tutoie

Connaissant ma douleur

Car je dis tu à tout ceux que j'en viens à haïr

Car je t'aime, sombre poésie courte

Mais j'aime trop de personnes

Même si je les connais pas


Rappelle-toi Barbara

N'oublie pas

Cette pluie sage et heureuse

Sur ton visage heureux

Cette pluie sur la mer

Sur l'arsenal

Sur le bateau d'Ouessant

Sur ma fichue clope trempée

Ne plus pouvoir trempé

Ne plus regarder

Ne plus te regarder

Alors j'écris


Qu'es-tu devenue maintenant?

Sous cette pluie d'ennui

de honte et de regrets

Cette pluie de la tromperie sonnant l'heure

Parmi les déchets des lieux abandonnés, livrés à eux-même

Comme je le fus moi, reprenant la route

Je repartais vers le soleil, étreinte brisée

Jurant que ma clope ne s'éteindra plus


Et celui qui te serrait dans ses bras

Amoureusement

Est-il mort disparu ou bien encore vivant?

Oh Barbara

Il pleut sans cesse sur Brest

Comme il pleuvait avant

Mais ce n'est plus pareil et tout est abîmé

C'est une pluie de deuil terrible et désolée

Ce n'est même plus l'orage de la guerre

de fer d'acier de sang

Tout simplement des nuages

Amoncelés

Qui crèvent comme des chiens

Des chiens qui disparaissent

Au petit matin, une clope au bec

Au fil de l'eau de Brest

ou naviguant sur les routes d'un ailleurs

et vont pourri au loin

plus loin très loin de Brest

Dont il ne reste rien

14/06/2010

289. au-delà de cette limite votre ticket n'est plus valable!


Elle émergeait des draps et des oreillers comme d'une bataille de cygnes et tendait la main à la recherche d'une branche pour regagner le rivage. Au moment de la plainte, elle cachait son visage comme si elle avait honte et empêchait son cri de monter au ciel en se mordant la main. Je lui dis que j'étais peiné par ce manque de charité pour les cieux.

- J'ai été élevée au couvent par les bonnes soeurs, m'expliqua-t-elle, et je fus surpris d'apprendre que les religieuses brésiliennes faisaient un tel voeu de silence.

290. la rage


à ranger: portraits de Balthus, chansons pour elle de Verlaine, DMZ tome 6, the boys tome 6, ecuador de Michaux et Poteaux d'angle aussi, Oedipe sur la route, Au-delà de cette limite votre ticket n'est plus valable, l'usage du monde, Citadelle de Saint-Exupéry, Walking Dead tome 11, le cercle des menteurs de Carrière, arnaque à l'arrache du sublime Paul Pope, Umbrella Academy, Swamp Thing de Moore, Tank Girl, les testaments trahis de Kundera et autres péripéties...


Je suis un geek formaté.

291. solitude impulsive


Des chariots étincellants que ta cruauté a fait défaillir

Dans le meilleurs comme le pire


Je voudrais un corps, là, tout de suite.

Tu me tues, tu me fais du bien.

ELLE.

13/06/2010

292. Romain Gary, les clowns lyriques


il arrivait même à Willie de penser que ce sera finalement dans une tarte à la crème que l'on retrouvera un jour, intacte, indélébile, l'empreinte de la figure humaine.
[...]
Mais Ann était depuis longtemps habituée à interpréter le langage de son père: il n'était plus que capable de parler à l'envers, se plaçant toujours à l'opposé de lui-même, pour exprimer le contraire de ce qu'il ressentait vraiment, ce qui était, depuis vingt-cinq ans, sa façon de hurler avec discrétion. A force de le déchiffrer, elle avait fini par se composer une sorte de dictionnaire personnel des équivalences. Lorsqu'il parlait d'un paysage qui avait "toute la banalité d'une carte postale", elle savait qu'il avait vu un paysage qui l'avait fait rêver; lorsqu'il parlait d'une littérature de "viande crue", il s'agissait de l'amour; une "femme vraiment primaire" était une femme qui lui avait fait des confidences sentimentales et l'avait ému; l' "art des cavernes" était un art qui composait harmonieusement le monde au lieu de le réduire en miettes, et un "intellectuel digne de ce nom" était toujours quelque estropié affectif comme lui-même, réfugié dans l'abstraction.

12/06/2010

293. étrange été


L'orage gronde, l'éclair fend le ciel en plusieurs morceaux de verre, il finit sa course en éclatant la falaise. Des blocs de rochers tombent, la maison tout en haut se retrouve un peu plus isolée. Dans le parc les arbres bouge à une allure fantasmagorique, sur la route une voiture à l'arrêt, le chauffeur ne bouge pas, ne sort pas sous cette pluie de chien. Ca lui donne un air de vieux démon, ces quelques lumières qui parsèment son visage. Une femme en robe blanche, sur le bord de la route, il n'ose rien lui demander et pourtant, on jurerait que c'est elle.

- Mademoiselle? Vous allez bien??

Elle le regarde, soucieuse, puis s'engouffre dans le bois. Se perdant au milieu des feuilles qui gesticulent en baissant la tête afin de mieux se protéger de la pluie. Et ça bouge partout, tellement qu'on croirait les quelques arbres touffus pris d'une vie obscure, inquiétante, habités par les fantômes du temps maudit.

Elle presse le pas en tremblant, il lui fait mal dans le ventre, l'enfant pousse. Ce n'est pas encore l'heure. Elle débouche sur la maison, minuscule bâtisse au toit troué. Quelques tuiles s'envolent encore, les volets claquent, le vent souffle tout autour "n'entre pas!".

Une lumière scintille derrière une fenêtre, une ombre qui passe devant la faible bougie. Elle frappe à la porte. Rentrez ma pauvre enfant! la voix est lointaine et fuyante. A l'intérieur tout semble prendre vie. La vieille dame n'y est plus, la maison retombe dans ces ombres perfides, immondes traîtresses depuis l'aube des temps où elle perdit de son pouvoir.

Voici le long couloir, les portes fermées, sur la droite un placard ouvert, des ustensiles renversées, un bidon d'essence, quelques produits ménagers. Elle marche dedans sans faire attention. La porte de droite, à tâtons elle cherche la lumière, une silhouette se dessine en face d'elle, elle prend peur en allumant d'instinct la lumière. Ce n'est rien que son propre reflet découpé dans un miroir brisé sur les côtés. La poussière est amassée un peu partout, quelques araignées règnent en maîtresses absolues sur le carrelage jaunie-brisé. Son reflet fait peine à voir. Hey l'amie, prends donc un bon bain! Ellle baisse les yeux sur la baignoire. On jurerait presque que quelqu'un vient de prendre place dedans tant le fond semble propre. Son reflet dans le miroir lui sourit, mais elle ne sourit pas au miroir, c'est étrange...Terrifiant...

Elle s'enfuit, mais les portes se sont rapprochées, elle se reflète sur une porte vitrée lazurée, son reflet éclate de rire. Un vieux démon est accroupi sur un lit derrière la première porte qu'elle ouvre, son regard se détache sur l'obscurité. les morts reviennent à la vie, le plancher éclate, les mains sortent de sous la terre en hurlant son prénom. Les toilettes ont des dents, tout semble ridicule à mesure qu'elle ouvre une porte, qu'elle en renferme une autre, qu'elle traverse se dédale fantômatique. Puis bientôt l'enfant, qui arrive à son terme, attrapé dans les abysses par des vieux démons. Une sorcière s'enfuit avec, elle poursuit la sorcière. Elle plonge au-dehors, la maison commence à s'écrouler. Elle saute avant que tout s'écroule, dehors la pluie est glacée, elle lui cingle le corps. Sa robe est trouée de partout, elle saute dans les ténèbres.

Juste un rire qui éclate, la tempête se calme au petit matin. Il y a la maison en haut de la falaise qui chaque jour s'enfonce un peu plus dans la mer. La mer est calme ce matin, tout en bas de la falaise, et le corps d'une folle flotte dans l'eau, un sourire aux lèvres. Ses yeux morts regardent le ciel. Elle tient dans ses mains, serrées contre elle, un baluchon auquel elle a dessiné des yeux et une bouche. Enfin, le sang sur son front forme une croix, et si on s'approche d'assez près on peut lire trois lettres. RIP.

294. au rythme de la terre; sans se presser


12 juin 2010 aux alentours de 19h: Le ciel n’existe plus, un ramassis gris a éteint le soleil d’une traite en coupant les montagnes en deux. Le doux chant des oiseaux est caché parfois par le fils d’untel, gueulant dans la cour de l’école aux alentours de ma maison, ou encore la fermeture d’une porte de bagnole en mauvais état suivi de son démarrage ridicule. Le temps chargé en humidité reste lourd tout de même, mon café a refroidi, ma Benson se consume, on pourrait jurer d’une paix sans équivalent mais il est tout autre. Agité de l’intérieur, secoué de spasme, rien à faire. Rien à y faire aussi. Ce n’est pas faute d’être sorti, de voir les visages inconnus qui défilent dans la rue, ce 14 juillet de tous les jours, le quotidien navrant d’une ville qu’on aime comme on peut haïr une femme.
J’ai le syndrome de la page blanche mélangé à celui de n’être jamais satisfait de moi-même. Alors je jette ce journal à la mer en m’empêchant de l’effacer au plus vite. Ne pas vouloir publier, continuer ainsi avec mon syndrome bizarre. La page blanche c’est aussi ce livre de Valérie Valère morte dans sa drogue, pourrie à la moelle. Le nom du livre m’échappe, il semble accessible à ma mémoire pourtant, il trône pas loin sur étagère, je le sais. Ce livre délicieux orné d’un page blanche tourbillonnante qui veut tout dire. La page blanche c’Est-ce qu’un auteur a parfois dans la tête, ça pourrait être un petit point pour la plupart mais la page blanche…Ah oui la page blanche…
Alors page blanche est aussi synonyme d’ennui, quand on prend le dictionnaire des synonymes à ennui il y a ça: souci. Ennui= souci, l’esprit est perturbé puisqu’il est « tracassé » par un souci donc ne fait rien pour pallier à ça. L’ennui c’est aussi ne plus rien avoir à en foutre, mortellement dangereux. L’ennui c’est trop, il n’est pas synonyme d’une avancée ni d’un coup de génie. Il est le grain de sable dans le rouage de la création, certes.
Puis l’on cherche à s’occuper, on relis vingt fois la même page de vingt livres différents, du mieux que l’on peut, on se dit que nos auteurs préférés sont morts, fallait-il en arriver là? Perros, mort en oublié, n’a jamais trop connu la gloire d’avoir un fan. Saint-Exupéry, perdu en l’air. Romain Gary-Emile Ajar, il me semble parfois qu’il s’est suicidé pour connaître encore plus de succès par la suite. Avez-vous lu la promesse de l’aube, éducation européenne ou encore la vie devant soi? Ils s’arrêtent tous quand Romain Gary signe son propre arrêt de mort: au-delà de cette limite votre ticket n’est plus valable. Bien triste tout ça. Les rares auteurs encore en vie que j’admire, c’est la conclusion, en viendront donc un jour à mourir, n’est-ce pas? Alors je serai seul dans ce grand lit froid, sans aucun amant.

11/06/2010

295. n'importe quelle rupture équivaut la nuit


Ce n'est pas moi qui méditerai sur ce qu'il advient de "la forme d'une ville", même de la vraie ville distraite et abstraite de celle que j'habite par la force d'un élément qui serait à ma pensée ce que l'air passe pour être à la vie. Sans aucun regret, à cette heure je la vois devenir autre et même fuir. Elle glisse, elle brûle, elle sombre dans le frisson d'herbes folles de ses barricades, dans le rêve des rideaux de ses chambres où un homme et une femme continueront indifférement à s'aimer.


[...]


la beauté sera CONVULSIVE ou ne sera pas.


Nadja, André Breton.

296. ah mais c'est qu'il est beau


se souvenir et souriez. Les petites étoiles dans le ciel, la faille toute proche. Ce long roulement de tambour que promulgue l'océan, cette ordonnance de douceurs prodigieuses. Les bruits et les lumières de la ville en pagaille qui semblent soulever le ciel ou le découper par endroits, vos corps endormis l'un dans l'autre sur le banc de sable. C'est que vos tentacules sont toutes attachées par le sel de la mer, qu'il faudrait vous haïr plus que la vie même pour vous dissoudre en aspirine dans un grand verre d'eau. Je suis le ciseau de vos pensées, le troisième larron, je tiens la chandelle mais ce n'est pas grave. Une mouette égarée, celles qui relâchent des parties de crabes, des souliers sans tête au milieu des algues échouées. Les quelques soleil qui laissent s'échapper la chaleur du soleil de la journée semble tourbillonner encore mais ce grand fracas terrible est le signe de l'impuissance de la flotte qui bien qu'elle s'imisce de part en part ne réussit qu'à peine à erroder ce bloc noir massif. Un tout petit peu par millénaire, les autres s'aiment encore sur la plage, y'en avait bien avant y'en aura toujours bien plus après. Sauf si le monde meurt ce soir à la réunion des mondes, en cet instant où le ciel semble se coudre à la terre, que la ville les rejoints, que dans un tourbillon tout disparaisse puisqu'on n'attend tous une fin en soi. Elle serra à l'image de leurs petits corps de poulpes, comme des sangsues qui collent à la peau.

05/06/2010

297. "je suis la pensée sur le bain dans la pièce sans glaces"


La maison de mon coeur est prête

Et ne s'ouvre qu'à l'avenir.
Puisqu'il n'est rien que je regrette,

Mon bel époux, tu peux venir.

298. j'ai rendez-vous avec vous


Un s'il vous plait peut faire tomber les princes. J'en ai vu des mots-tyrans qui supprimaient dans le noir, et on laissait les hommes tomber. La vérité c'est le mot. Oui et non. Strasbourg 1980 quand l'autre disait: "je suis un insoumis et qui a redonné à la Marseillaise son sens initial". Puis les hommes tombent en coulisse, par l'oiseau qui chute dans une chanson tout proche d'un petit garçon. Les mots m'avaient promis tes caresses, ils ont ri de moi. Dans le noir je les voyais flamber ces traîtres infâmes d'un plaisir qui n'était déjà plus le mien. Et puis l'autre qui disait qu'il fallait apprivoiser les mots, les faire picorer dans sa main moi je veux bien...

Mais les mots m'ont pris mes mains!

04/06/2010

299. j'envisage des bruits sourds


Je viens de passer cinq heures à peindre dans une solitude autre que celle de Ferré. Mes mains sont entachées de ce crime, elles sentent aussi le café et le tabac refroidi de ce long passage. Bien autrement que tout, il me fallait fuir sans aller de l'avant, mais l'avant c'est où? Je ne le saurai sans doute jamais. L'élément le plus dur dans la peinture c'est ce qui peut suivre après, une fois que tu as fini tes petits détails, que tu as accroché ta toile au-dehors de la maison. L'excitation sur le moment est un débordement, tu ne tiens plus en place et refait l'appartement à l'aide de tes pieds, semblant creuser un sillon dans le sol de chaque pièce autre que la chambre exigüe dans laquelle tu viens de peindre. Ivre de peinture, tu relis Bacon, Turner, Basquiat. Même ces vieilles lettres de Van Gogh ou Gauguin (Oviri). Mais cela ne passe pas, les mots des peintres ne t'aideront pas, tout au plus leurs oeuvres te rabaisseront, tu ne les égaleras jamais, tu n'arriveras jamais à leurs chevilles. Et c'est tant mieux, qui voudrait de ce moment funeste où il n'y a plus rien à foutre de cet état de manque. Tu t'asseois dans un coin en tremblant, Nicolas Bouvier avec son L'usage du monde t'occupe à peine pendant que tu trembles toujours en t'allumant ta dixième clope de la journée. Tout tremble, tout le monde tremble, c'est un séisme sans envergure que l'échelle de Richter (voir de Jacob) ne peut pas mesurer. A nouveau tu regardes tes mains pleines de ce cambouis multicolore, tu les trouves jolies un instant, puis il te faut les laver pour cacher les traces. Pour enlever les preuves. Retour à la chambre, tu ranges le tout, tu laves les tâches qui restent au sol, t'essaies d'aérer ces odeurs délicieuses de térébentine, d'huile et de white spirit qui tardent à partir, faute de la chaleur, du soleil de petit soldat de plomb qui règne dehors. Faute de tout, tu fuis. Il faut fuir alors sans avancer mais sans reculer. Ne pas avouer le crime si l'on te choppe, partir sans se retourner sur les corps chimériques-inachevés de tes toiles; les oeuvres que tu as commises par le passé plus celle que tu viens de faire. Enjambe alors les corps, tu te dis pour toi-même, dis à ce petit bonhomme qui te parle qu'il faut partir, aller loin pour cacher le corps. Mais aussi que tu te sens encore plus coupable de ce meurtre. Ce meurtre délicieux que tu viens de commettre... Ce meurtre tu l'as bien savouré, mais maintenant tu as peur, tu es effrayé, regarde-toi...tu recommences à trembler...
Qu'est-ce que tu baves? J'ai fait le premier autoportrait de ma vie.
Non, il y'en a eu d'autres avant cela. Oui je sais, mais celui-là c'est le seul. L'unique.
Pourquoi donc? Parce qu'il est effrayant de sincérité, de simplicité et de sournoiserie.

02/06/2010

300. les temps cruels réveillent l'archange endormi


Ah mais oui, il ne reste que la poésie dans ce bas-monde. J'en suis certain. Des oeuvres grandioses ou des petits détails de la vie. L'autre jour au café il y avait cet homme qui lisait. Il semblait en-dehors du monde, jurant avec les abreuvés du comptoir. J'aimais le dessiner. Ca avait duré quelques minutes, juste une esquisse dans mon carnet, les grandes lignes comme on souligne un passage important dans un livre. Moi j'ai bâti l'empire dans le coeur de mes sentinelles en les contraignant à faire les cent pas sur les remparts; trois-cent quatre-vingt-dix neuvième page de l'édition F. Dans le contexte social on peut révéler une part de mystère mais aussi de poésie du moment, cette poésie rapide, saccadée comme un vers surréaliste de Breton. La lavandière transformée en conchita du ménage, le dos voûté, qui s'arrête un instant pour vérifier si le soleil est encore là.Non, le monde ne vient pas de s'arrêter de tourner. La poésie du début est devenue celle de la naissance. Le moment important sur la musique de 2001, l'odyssée de l'espace. Ainsi parlait Zarathoustra. Son corps usé, enflé, me rappelle les mains caleuses de mon grand-père à la fin de sa vie, la corne qu'il avait dans chaque doigt, ce tremblement survenu à la fin quand il disait: "ah, apportez-moi donc mes jumelles. Et pourquoi? avais-je demandé en lui demandé cette main qui ne savait plus se resserrer sur la mienne. Mais t'es con ou quoi? Il me faut voir le Paradis pour y aller! me confia-t-il dans son dernier verset." Alors la poésie sévère d'un militaire quand il change l'arme d'épaule, celle du général sur le champ de bataille comme une toile de Géricaut qui se brise, qui doute sur le combat. Il lui faut encore songer à la guerre. Longues réflexions assis sur une cantine de métal. Le bras posé sur le genou, la tête sur la main. Les yeux penchés, en biais, n'importe où mais pointés vers le bas. Le militaire est politique. La politique ne pense plus, elle agit. Voilà le poème le plus court de la politique qui veut tendre à l'action sans y arriver. Poème de menteur, fausses vérités qu'on cache sous le coude à côté des pots-de-vins. Le vin du curé dans sa bible, dans le Coran épuisé des Mollah qu'on ne peut comprendre nous, occidentaux. Les quatrains amoureux d'un Jules Vernes sur l'intélligence, ceux de Hugo ce vieux salopard qui mourra la queue raide pour une servante aux cuisses bien grasses. Je vous dédie ce poème ma mie...

L'oiseau s'envole. Les arbres s'envolent dans la tourmente. Les feuilles vibrent par le vent. Les animaux hurlent à la lune ces longues litanies de vies brisées, tourmentées ou heureuses. Un maître dans le noir vient de mourir. Requiem pour les cons, les sauvages, les désespérés suicidés ou non, les fous, les pauvres, les intégristes, les amoureux, les riches, les artistes, les surréalistes, les peintres aux yeux minuscules, les travailleurs et les flemmards, les derniers instants de tout ce petit monde et l'autre qui dit finalement dans cet ultime poésie du dernier souffle: Voici distribuées les demeures des hommes sous les étoiles.

01/06/2010

301. jeune homme cherche jeune homme


Je suis un garçon sensible et réfléchi au grand corps sec. Certain disent de moi que je suis un idiot, je reste le rêveur. Des fois je m'arrête en plein milieu de la rue. Il ne se passe rien d'autre. Me voilà debout, les bras balants, le Poulpe est mon héros personnel, mais je n'ai pas cette intelligence de Sherlock malheureusement. A midi je peux en lire quelques pages en gare de Saint-Lazare. Je me paume sous mon chapeau, j'essaie parfois d'en rire. C'est difficile. Je tends à la poésie parfois. Thomas Fersen m'aimait bien. Je remercie tout le monde, j'essaie de sourire, je suis timide devant une femme. Mes longs cils et mes mains aux longs doigts anguleux se perdent dans le noir. Dans les ombres d'un corps. Dans les prémices du sexe. Ma bouche se tend vers lui. Un corps c'est tout ce qu'il en est. Je ne tiens plus qu'à ça. Dans la vie il n'y a que les corps qui restent intéressant. L'intérieur est bon à jeter à la poubelle: que de la méchanceté qui entache le monde. J'aimerai tout changer pour se monde de robot. L'homme du moment. Ouais, Gare Saint-Lazare, ok. Je suis amoureux. J'ai des envies de suicider mon esprit, n'être plus qu'un corps, et mourir de poésie, ivre d'amour.

302. Car il n'est point de cathédrale sans cérémonial des pierres


Nuit où l'on entend craquer les vertèbres.

Nuit dont j'ai toujours entendu craquer les vertèbres comme de l'ange ignoré que je sens épars dans mon peuple et qu'il s'agit un jour de délivrer...

Nuit des semences reçues.

Nuit de la patience de Dieu.