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25/12/2010

155. petite puce


J'ai fait tomber une dent dans évier, quelques mèches de cheveux, un brin d'épicéas, quelques souvenirs. Dans le grand cercle d'émail j'ai donné aux flammes une photo de nous quand nous étions gosses. Un peu d'estime de soi est aussi passé à la trappe, je me suis souvenu des grandes vallées, des odyssées d'autrefois, lorsqu'enfants nous étions les seigneurs d'un peuple de moutons ou de trois chevaux made-in-normandie. Dans mes souvenirs y'avait un chien aussi qui courait tout autour de nous, un pauvre cabot trois-francs-six-sous. On le surnommait Sissou d'ailleurs, non? j'ai jeté un peu de lui dans la grande bouche de l'évier, avec un collier de perles de ma mère qui le tient de sa mère qui elle-même le tient de sa mère et qui... ainsi de suite. J'ai versé quelques larmes ensuite, mon visage se démolissait dans le grand miroir édenté. L'ampoule clignotait, j'ai jeté quelques pièces, quelques cailloux, quelques babioles. Un whisky pur malte et mon meilleur cigare. J'ai rebouché le tout avec du sparadra, un peu de ciment, et j'ai bétonné l'entrée de la salle de bain. Au petit matin du jour suivant, le soleil me surprit un verre à la main assis dans mon trône lugubre. Je régnais sur des bibliothèques vides, mortes, évaporées. Dans mes yeux on lisait l'oubli. J'ai voulu me laver le visage, je me suis demandé quel con avait fermé ma porte de cette manière. Alors j'ai attendu patiemment le lendemain. Demain sera un autre oubli.

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