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30/08/2010

220. bien des dimanches d'ennuis ont fait l'homme que je suis devenu


Je n'en savais pas plus sur elle que ce que j'avais partagé, nous étions dans un bar. J. nous servait nos menthes à l'eau, j'étais ivre de quelque chose, sans savoir mettre un nom là-dessus. Et nos passions demeuraient incertaines. Inabordables.

Aux toilettes je repensais souvent à ma grand-mère, à tout un tas de choses, était-ce la couleur du papier peint ou l'odeur du savon qui s'y prêtait, je l'ignorais, je continuais mon bonhomme de chemin revenant ainsi tous les soirs dans ce même lieu dans le but de la voir. Elle ne travaillait pas le dimanche, alors tous les dimanches étaient d'ennui. Elle finissait plus tôt le lundi aussi, je trouvais la journée trop longue quand elle ne venait pas.

Alors j'en vins à connaître le nom de ces serveurs de l'absurde, du grand dadais qui ne savait pas quoi foutre de ses dix doigts au petit nain qui bougeait si vite qu'on ne voyait plus ses mains à des moments. L'odeur du café était toujours délicieuse, les volutes de sa fumée se perdait dans le vide de la terrasse, pour elle je pouvais arracher des montagnes avec les dents, dévaster des océans de soldat, ou me jeter à ses pieds...
J'aimais venir tôt le matin, très tôt alors. Le journal venait d'être livré, je sentais les pages se réchauffer entre mes doigts, leur petit monde débutait inlassablement, pareil à la veille en tous points. C'était un peu le calme avant la tempête.

J'avais goûté tout ce qu'ils proposaient sur la carte, de temps en temps je servais de cobayes à leurs nouveaux cocktails, je n'étais pas plus courageux qu'un autre: j'aurai dû lui dire à quel point elle comptait pour moi avant que les choses ne se compliquent.

Un matin de décembre elle n'était plus là.

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