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08/08/2010

246. Henry Bauchau, Oedipe sur la route (again)


Œdipe est en mer, en pleine tempête, le vent hurle au-dessus de lui, les vagues frappent à coups sourds les flancs du navire et parfois le submergent. Le plus terrible ce sont les cris, les cris de ceux qui ont peur, qui sont renversés ou emportés par les lames. Ces cris pourtant vous soutiennent car ils signifient que vous êtes là, que vous luttez encore. Le naufrage est sûr, vous êtes déjà tout engourdi par les vagues glacées qui vous assaillent, mais en somme tant qu’on crie, on est vivant.
Le matin, il n’y a plus de bateau, plus de marins, plus rien que son corps étendu, qui crie de plus en plus faiblement au milieu d’une mer démontée. Il éprouve une présence qu’il ne peut ni voir ni toucher et, à cause d’elle, la douleur de son corps s’aggrave. Il voudrait bien, dans cette violence et bientôt dans cet excès, être encore cet Œdipe évanoui qui criait sur un navire en perdition.

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