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12/06/2010

293. étrange été


L'orage gronde, l'éclair fend le ciel en plusieurs morceaux de verre, il finit sa course en éclatant la falaise. Des blocs de rochers tombent, la maison tout en haut se retrouve un peu plus isolée. Dans le parc les arbres bouge à une allure fantasmagorique, sur la route une voiture à l'arrêt, le chauffeur ne bouge pas, ne sort pas sous cette pluie de chien. Ca lui donne un air de vieux démon, ces quelques lumières qui parsèment son visage. Une femme en robe blanche, sur le bord de la route, il n'ose rien lui demander et pourtant, on jurerait que c'est elle.

- Mademoiselle? Vous allez bien??

Elle le regarde, soucieuse, puis s'engouffre dans le bois. Se perdant au milieu des feuilles qui gesticulent en baissant la tête afin de mieux se protéger de la pluie. Et ça bouge partout, tellement qu'on croirait les quelques arbres touffus pris d'une vie obscure, inquiétante, habités par les fantômes du temps maudit.

Elle presse le pas en tremblant, il lui fait mal dans le ventre, l'enfant pousse. Ce n'est pas encore l'heure. Elle débouche sur la maison, minuscule bâtisse au toit troué. Quelques tuiles s'envolent encore, les volets claquent, le vent souffle tout autour "n'entre pas!".

Une lumière scintille derrière une fenêtre, une ombre qui passe devant la faible bougie. Elle frappe à la porte. Rentrez ma pauvre enfant! la voix est lointaine et fuyante. A l'intérieur tout semble prendre vie. La vieille dame n'y est plus, la maison retombe dans ces ombres perfides, immondes traîtresses depuis l'aube des temps où elle perdit de son pouvoir.

Voici le long couloir, les portes fermées, sur la droite un placard ouvert, des ustensiles renversées, un bidon d'essence, quelques produits ménagers. Elle marche dedans sans faire attention. La porte de droite, à tâtons elle cherche la lumière, une silhouette se dessine en face d'elle, elle prend peur en allumant d'instinct la lumière. Ce n'est rien que son propre reflet découpé dans un miroir brisé sur les côtés. La poussière est amassée un peu partout, quelques araignées règnent en maîtresses absolues sur le carrelage jaunie-brisé. Son reflet fait peine à voir. Hey l'amie, prends donc un bon bain! Ellle baisse les yeux sur la baignoire. On jurerait presque que quelqu'un vient de prendre place dedans tant le fond semble propre. Son reflet dans le miroir lui sourit, mais elle ne sourit pas au miroir, c'est étrange...Terrifiant...

Elle s'enfuit, mais les portes se sont rapprochées, elle se reflète sur une porte vitrée lazurée, son reflet éclate de rire. Un vieux démon est accroupi sur un lit derrière la première porte qu'elle ouvre, son regard se détache sur l'obscurité. les morts reviennent à la vie, le plancher éclate, les mains sortent de sous la terre en hurlant son prénom. Les toilettes ont des dents, tout semble ridicule à mesure qu'elle ouvre une porte, qu'elle en renferme une autre, qu'elle traverse se dédale fantômatique. Puis bientôt l'enfant, qui arrive à son terme, attrapé dans les abysses par des vieux démons. Une sorcière s'enfuit avec, elle poursuit la sorcière. Elle plonge au-dehors, la maison commence à s'écrouler. Elle saute avant que tout s'écroule, dehors la pluie est glacée, elle lui cingle le corps. Sa robe est trouée de partout, elle saute dans les ténèbres.

Juste un rire qui éclate, la tempête se calme au petit matin. Il y a la maison en haut de la falaise qui chaque jour s'enfonce un peu plus dans la mer. La mer est calme ce matin, tout en bas de la falaise, et le corps d'une folle flotte dans l'eau, un sourire aux lèvres. Ses yeux morts regardent le ciel. Elle tient dans ses mains, serrées contre elle, un baluchon auquel elle a dessiné des yeux et une bouche. Enfin, le sang sur son front forme une croix, et si on s'approche d'assez près on peut lire trois lettres. RIP.

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