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04/07/2012

14. ce que la puanteur peut laisser

Ce soir-là j'étais un peu agité, faut dire qu'il faisait un froid de fin de monde, l'humidité dessinait des volutes gercées sur les capots des bagnoles tout autour de nous. La neige arrive demain. Nous nous sommes dirigés dans un bar, la vieille habitude de nos ancêtres. J'ai parlé un peu, j'avais envie surtout de parler beaucoup, mais pour rien dire, afin que la conversation ne meurt pas. En fait, ce qui m'agitait c'était l'absolue nécessité de prendre un verre de quelque chose que je ne trouvais pas. J'avais aussi faim, une faim qui me tiraillait l'estomac puisque tout le jour durant je n'avais rien avalé. Aussi, j'avais envie de dévoiler un peu de mes pensées, j'aurais pu dire alors que miss A. me tirait une pensée d'un ailleurs étrange, asexué, et que miss C. revenait sans cesse pour troubler tout ça. J'avais aussi envie de demander à Alex ce qu'il pensait réellement des nécessités, que savait-il de la vie, où commençait l'amour et où s'arrêtait-il? S. après tout n'était qu'une plaie qui ne voulait pas guérir, parfois les morts reviennent aussi à la vie. Mais S. était présente dans mes pensées que par le fait que j'allais bientôt fêter la mort d'un autre, alors la vieille déchirure, cette fin d'année qui revient sans cesse, je revois les même évenements, je me rouvre à nouveau, je me ronge jusqu'au sang, je me dis à quoi bon? mais sans rien faire. Et puis j'ai rien demandé de tout ça à Alex, à quoi bon?


au bout d'un moment les voitures évoluaient normalement dans les rues glacées, on suspendait nos souffles dans l'air, bien visible, on examinait les phares de ces caisses-là se perdre dans la nuit, on écoutait le bruit en suspens, j'aurai bien aimé détailler les tons de la lumière qui régnait en ce lieu. Comme si le monde était devenu gris, comme si chaque jour je devenais un peu plus mort, m'éteignant à la même vitesse que ma cigarette se consumait. Puis j'avais perdu H., j'avais perdu T. aussi, et bien d'autres encore, je les laissais partir, je les poussais même parfois, et parfois j'en riais, parce que le monde est une grotesque farce à des moments dans lesquels Hank Moody ne peut rien, on s'asseoit sur le banc, on voit tout changer autour de nous, on assiste aussi impuissant que notre grand-père face aux gros seins de notre première amoureuse. Cruauté diabolique, souillarde infâme, la voix seule gueule dans le néant: un jour je niquerai ta sale gueule.

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