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26/07/2010

257. une histoire française


C'est au fin fond de la France que ça se passe mais ça pourrait se passer dans n'importe quelle ville. Autant ne pas la nommer, c'est illusoire, ça n'existe pas. Il y avait donc une route, un restaurant type restauration rapide / menu ouvrier, ce genre de truc qui ne paye jamais de mine mais plutôt sympa pour traîner en écoutant les autres déblatérer leur vie.

J'appréciais ce genre de grisaille, le temps qui vire à l'orage prochainement, la brume recouvrant les toits, les toits n'existent plus.

La première fois que j'ai chié ici je me suis lavé les mains quatre fois de suite tant je me sentais sale. Les mouches volent, elles ont élu demeure ici, elles viennent t'emmerder jusque dans ton assiette ou copuler sur ta main. Vers le bar ce sont des histoires interminables qui traînent entre le demi, le pastis, la gnole du patron. Le regard de celui-ci, un peu gentillet sur les bords du genre à habiter encore chez maman. Même le dehors a un peu de cette âmee, c'est tout le coin qui semble ainsi. A la limite du cas social.

Dans la rue, le tabac-presse titre depuis un mois les destins tragiques, histoire d'une haine trône en gros plan par-dessus la photo de deux femmes. Des fois le serveur sort s'en griller une, des fois c'est moi qui vient à lui le déranger dans ce moment précieux. Deux paquets de Benson svp. Merci. Bonne journée. Aujourd'hui il y avait cet instant étrange, à la limite du merveilleux. Cette vieille dame sur son scooter, s'arrêtant en pleine circulation pour consulter la carte, quelques filets de pêche à ses pieds, son casque ne lui allait pas, sur le côté un technicien d'EDF qui vérifiait les compteurs en laissant tiédir sa bière à l'intérieur. Moi j'étais assis sur le côté, à fumer encore plus qu'a l'accoutumée, c'est dire si je fumais. Quelques noire magnifiques passaient en bagnole, de vieilles rengaines marseillaises en tête, je n'étais pas prêt à les revoir.
Puis on sonna à la porte d'à côté, l'autre, cette vieille dame usée aux mains défaites, la retraite bien sonnée qui cherche à faire tourner la boutique. Son regard se perd quelque part sur le bitume. Elle a perdu ses rêves, il ne lui reste plus rien que le travail. Son pauvre mari est mort. Il ne lui reste plus que le travail.

Ca colle quelque part aux tripes, c'est une histoire en France où les bonhommes se racontent les dimanches d'ennui autour d'un godet, on parie sur tout ce qui bouge, ça rit, ça boit, ça picole. Un monde délicieux de simplicité.

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